QUITO (Equateur 18/09/2009 : 20 heures (par Fred)
QUITO (Equateur) mercredi 18/092009 : 20 heures. (Euromarktinteractive.org)
Cette histoire de cryologie tracassait Delpierre. Jusqu'à maintenant, ils ne risquaient rien. Leur couverture était parfaite. Elle résista même à un contrôle, au musée Saint Louis. Le père de Maggy avait bien fait les choses. Jusque-là, tout était légal. La base de lancement, bien qu'inconnue du grand public, avait une existence licite.
Mais cette affaire de cryologie qui n'avait pas sa place ici, ne lui disait rien de bon. Au Gabon, leurs ennuis avaient commencés lorsqu'ils s'étaient approchés d'un peu trop près des « frigoristes ». Il ne tenait pas à commettre la même erreur.
Surtout que rien ne lui interdisait de penser qu'il puisse y avoir un lien entre eux.
Dans la journée, Maggy avait appelé son père sur son portable.
-- Hello, Daddy ! C'est Maggy… Au départ, tu nous avais promis deux « Baby-sitters » pour nous protéger pendant nos vacances… Gérard et moi n'avons encore vu personne. Tu es sûr qu'ils ne se sont pas évanouis dans la nature ? Ou encore qu'ils ne se sont pas trompés de colis à l'aéroport ?
-- Il n'y a aucun risque ! Ils m'appellent chaque jour à la même heure.
Ils m'ont même fait parvenir des photos de vous… Très réussies je dois dire ! Et tendres ! C'est pour quand le mariage ? Vois-tu ma chérie, ils sont tellement discrets qu'ils peuvent se fondre dans la foule à moins d'un mètre de vous... vous ne les remarqueriez même pas. Ce sont des pros. Ils sont à la hauteur. Tout ira bien. Soyez sans crainte !
A demi rassuré par ces paroles, le couple finit par se jeter dans la fosse aux lions. Sous couvert de dialogue avec de jeunes étudiants de derniers cycles, ils agirent comme à leurs habitudes dans les bars et brasseries, situés aux abords du campus.
Ils eurent l'idée de leur faire briller l'avantage qu'il y a à travailler pour le Ministère de la Culture… surtout aux States. Ils leur apprirent que, « justement », le Musée d'Art Amérindien de Saint Louis recherchait de jeunes spécialiste du précolombien. Les étudiants étrangers y seraient les bienvenus. Gérard alors, insensiblement, commença à se renseigner sur les débouchés locaux. Puis il dirigea tout doucement la conversation sur les spécialistes du froid.
De fil en aiguille, ils apprirent où se trouvait le fameux point de chute. L'un des étudiants se proposa même de les accompagner. Maggy se demandait si ce n'était pas tout simplement un pique-assiette, vu que c'étaient eux qui réglaient les notes depuis le début.
Delpierre, finit par les mettre en confiance, en leur racontant les soirées passées avec ses amis frigoristes parisiens. Il s'était fait passer pour un Américain ayant fait une partie de ses études en France.
D'abord tendu, le climat se réchauffa, sans jeu de mot, ce qui pourrait paraître un « comble » pour des spécialistes du froid. Vers la fin de cette première soirée, Gérard avait appris que la plupart d'entre eux travailleraient, à la fin de leurs études, pour cette société américaine. Elle les avait engagés pour la construction. Ils espéraient y rester ensuite, pour assurer la maintenance.
Un grand nombre d'eux partaient régulièrement. On ne les revoyait que pour les congés annuels. Tous semblaient ravis de leur nouvelle situation. Sauf un certain Moreno. C'était un des premiers à avoir été employé par la Compagnie et il aurait été renvoyé pour une banale affaire de vol. Depuis, l'homme n'avait plus de travail et traînait dans le quartier San Marco. Il y dépannait encore quelques chambres froides. Mais il passait plus de temps « à se torcher la gueule » à la Bodega, dans la « calle juan Rodriquez y Diego Almagro », qu'à bosser.
-- Si ce n'est pas malheureux de voir ça ! Un des meilleurs technicien du froid de la capitale ! Et tout ça pour un petit vol de rien du tout ! Quelle tristesse d'en arriver là... leur dit le patron indigné.
La Bodega était plus un bar qu'un restaurant. On y servait, pour le déjeuner et pour le dîner, un peu de cuisine simple et familiale. Deux ou trois tables se remplissaient difficilement. Le reste était occupé par des consommateurs qui buvaient plus d'alcool que de jus de fruit.
Ce soir-là, une dizaine d'habitués, femmes et hommes confondus, se pressaient au comptoir, devant une ligne de verres et de bouteilles. Les « Pilsener » et les « Club », les deux marques de bières les plus appréciées entourées de cendriers aux trois quart pleins, ornaient le dessus du zinc.
Tout ce petit monde parlait ou plutôt braillait, chantant à en rendre l'âme. Les femmes n'étaient pas les dernières à se faire entendre.
Au bout du bar, José Moreno « s'envoyait » bière sur bière. En une heure, Maggy et Gérard en avaient dénombrées cinq. A cette allure-là, ils ne pourraient bientôt plus rien en retirer. Il était urgent d'intervenir vite, avant qu'il ne soit trop ivre.
Malheureusement, il y avait trop de monde autour de lui pour tenter une approche.
Tout à coup, Moreno demanda un jeu de cartes au patron et s'adressa à la cantonade :
-- Y a-t-il des clients pour une partie de carte ?
Apparemment, en plus de buveur, il était aussi joueur. Son plus proche voisin se déclarant « partant », ils se déplacèrent à l'autre bout du bar, là où il y avait moins de monde.
Maggy sauta sur l'occasion. Empoignant son verre vide, elle se rapprocha du comptoir et commanda une nouvelle tournée. Le bruit était tel, que le geste semblait parfaitement naturel. En attendant que le serveur s'exécute, elle se tourna vers les deux hommes.
-- C'est curieux comme jeu ! On peut donc jouer à deux ?
Moreno, remarquant l'accent américain, s'imagina sans doute qu'elle faisait partie de la société qui l'avait licencié. Il répondit assez froidement et à la limite de l'incorrection.
-- Et alors ? On joue comme on veut ! On est encore chez nous en Equateur !
Maggy utilisa son plus beau sourire.
-- Vous savez, si je vous demande ça, c'est uniquement parce qu'au musée, où nous travaillons, mon ami et moi, et notre vie au quotidien, nous n'avons guère le temps de nous divertir.
Complaisamment le deuxième joueur invita Gérard à venir se joindre à eux.
Pendant qu'il leur expliquait les règles, Moreno, semblant ronger son frein, parla vivement à son partenaire en patois « Quichua ». Il n'avait pas du tout envie de pactiser avec l'ennemi.
-- Mais que vas-tu t'imaginer ? Elle vient de te dire qu'ils bossaient pour un musée ! Ils n'ont rien avoir avec la boîte qui t'a viré. Lui répondit-il dans la même langue.
-- Au fait, continua-t-il en Espagnol… Pour quel musée travaillez-vous ? Pour un musée Equatorien ?
Maggy et Gérard n'eurent plus qu'à se présenter et de conter la petite histoire de « Saint Louis », qui semblait si bien marcher.
Les deux joueurs avaient interrompu leur partie de carte. La conversation démarrait bien. Moreno encore un peu réticent, semblait moins agressif. Petit à petit il commença à se mêler à la conversation.
Pour finir de l'apaiser, Gérard proposa une autre tournée. A sa façon d'accepter, il vit qu'il n'y avait plus de malentendu.
Vers vingt et une heures, le deuxième homme, qui ne s'était pas encore présenté, prétendit qu'il avait à faire le lendemain, et s'en allât. Bien que Gérard n'encourage pas la façon qu'ont certaines personnes ont de boire plus que de raison, il en profita pour offrir une nouvelle tournée.
De toute façon, il savait qu'avec ou sans lui, l'homme allait continuer de boire. Et peu à peu, Moreno entre deux lampées de bière, en vint aux confidences.
Il pleurait presque ! Lui faire ça à LUI… lui qui n'avait jamais rien volé…
Parce qu'on avait voulu lui faire porter le chapeau… lui qui était un des meilleurs frigoristes de Quito, sorti le premier de sa promotion ! Dans la foulée, Moreno leur commenta les plus belles réalisations de sa carrière.
Maggy et Gérard compatissants, l'écoutaient sans oser l'interrompre. Il fallait le laisser venir de lui-même à faire des confidences sur le site…. Pour cela, il fallait d'abord qu'il vide son sac.
La soirée était déjà bien avancée. Jugeant qu'il était tard, et qu'ils n'en tireraient rien de plus pour ce soir, l'alcool commençant à faire son effet sur l'Equatorien, Maggy et Gérard décidèrent de lever le camp. Ils promirent à Moreno de repasser le lendemain.
Moreno était prêt à parler. C'était sûr. S'il y avait quelle chose à apprendre sur cette histoire de froid, c'était bien lui, l'homme de la situation. De plus, il semblait vraiment sincère au sujet de l'affaire du prétendu vol.
Pourquoi diable l'avait-on licencié ? Alors qu'apparemment c'est un très bon frigoriste ? Cette histoire de vol ne tenait pas debout. Il était plus que probable, que Moreno avait surpris quelque chose qu'il n'aurait pas dû apprendre ou voir.
Il faisait un temps de chien ce jeudi-là sur la capitale. Le thermomètre avait terriblement chuté… Déjà que Quito se trouvait à plus de deux mille huit cent mètres d'altitude… Contrairement au reste du pays, il y faisait en permanence plus frais. Entouré de volcans, le temps y était capricieux. Il y pleuvait souvent et la température n'excédait pas treize degrés, en moyenne !
Courageusement, Maggy avait voulu visiter la vieille ville. Le quartier colonial, vieux de cinq siècles, avait été reconstruit à l'identique sur les ruines de l'ancienne cité Inca…. Les autochtones l'avaient rasée lors de l'arrivée des conquistadors. Mais la météo capricieuse avait joué les troubles fêtes et en avait décidé différemment.
Pour se réchauffer, ils choisirent d'aller goûter à la Bodega le « lecro », cette fameuse « soupe » que tout Equatorien affectionne tout particulièrement. Ils se firent servir aussi un « pollo à la brasa ». Ce plat national consiste en une forte portion de poulet cuit à la braise, et servi avec des frites.
Le restaurateur, bien qu'ayant l'air surpris, prit leurs commande. Il leur précisa que pour la soupe, il n'y avait pas de problème vu qu'elle était servie à toute heure, mais pour le poulet, il fallait attendre un peu.
A peine étaient-ils installés à une table près du bar, que l'ex-partenaire de cartes de Moreno entra accompagné d'une ravissante Equatorienne. Ils s'attablèrent au fond de la salle. Delpierre comprit qu'ils ne voulaient pas être dérangés. Cinq minutes tard, alors que leur soupe n'était pas encore servie, Moreno entra. Gérard lui fit signe de les rejoindre, jusqu'à ce que celui-ci se rapproche de leur table.
-- Salut. Vous avez bien profité de votre journée ? Avec un temps pareil ! La remarque de l'autochtone ne manquait pas d'ironie.
-- Voulez-vous vous venir vous asseoir avec nous, et partager notre repas ? Lui demanda Maggy.
Moreno commanda un « lecro » et s'assit à son tour, à côté d'eux.
-- Vous ne prenez rien d'autre ? Mais c'est nous qui vous invitons, dit Maggy surprise.
-- Ah, vous les Américains, vous êtes marrants. J'ai l'impression que vous connaissez bien mal notre pays. Un « lecro » ça suffit bien !
Maggy regrettait déjà sa proposition. Leur interlocuteur n'était certainement pas aussi fortuné qu'eux. Et la façon de se restaurer des Equatoriens était sans doute en rapport avec l'épaisseur de billets qu'ils avaient en poche.
Mais quand le restaurateur revint avec les soupes, elle comprit sa méprise.
Le « lecro » était bien un potage, mais à lui seul, il valait bien tout un repas. Fait à base de pommes de terre, d'avocat, de fromage et de graines de lupin, ce plat, non seulement était plus que copieux, mais de plus vraiment excellant. Il pouvait faire office d'entrée, de plat de résistance et de dessert.
A ce moment-là, et à ce moment-là seulement, elle comprit la surprise du restaurateur, lorsqu'ils avaient passé leur trop copieuse commande. Naturellement, en bon commerçant, celui-ci s'était bien gardé de leur en faire la remarque.
-- Ton ami a l'air en bien charmante compagnie ? Dit Gérard à Moreno. Il adoptait le tutoiement de la veille, en lui désignant le couple de métis au fond de la pièce !
-- Ce n'est pas mon ami. Je ne l'avait encore jamais vu avant l'autre soir. La femme non plus d'ailleurs. Elle était là aussi, mais seule et à une autre table. C'est un rapide, ce mec, il n'a pas perdu de temps !
Tout doucement, Delpierre orienta la conversation sur la profession de Moreno… le « froid » ! Quand il parlait boutique, le métis était intarissable. Il leur expliqua sa passion pour les appareils de production de réfrigération. Et il leur fit tout un cours, sur les différents gaz employés en fonction de leurs applications finales.
Il leur décrivit, par exemple et dans le menu, la différence entre un fluide azéotropique et un zéotropique… La pompe à chaleur pour la clim d'une maison, n'utilise pas le même gaz que celui d'une chambre froide, d'une vitrine réfrigérée ou d'une patinoire.
Le « R407C » remplace le « R22 » dans les installations neuves de conditionnement d'air de petites puissances. Il y avait aussi le « R134a », le « R404A »…
Toutes ces appellations virevoltaient dans la bouche du métis… Tout y passait. Les explications techniques étaient difficiles à comprendre. Delpierre en arriva à regretter sa curiosité. Mais, il fallait accepter d'en passer par là s'il voulait arriver à ses fins.
-- C'est comme pour cette société Américaine qui m'employait… Je me suis rendu compte qu'ils utilisaient du « R408A » ! C'est illogique ! Il n'y a pas besoin de climatisation proprement dite… Une simple « VMC » (ventilation mécanique contrôlée) serait plus que suffisante dans cette région… De plus, je n'ai pas ou très peu vu de matériel pour climatisation.
Le « R408A » est un « HCFC », mis au point à la suite des accords de Montréal. Il est surtout réservé pour des utilisations d'entrepôts frigorifiques et de surgélations alimentaires. Mais surtout, il est réglementé dans le temps. Il devrait être remplacé dans les années 2030 ou 2035. Il ne sert que de transition au « R502 », qui est un « CFC », appelé à disparaître prochainement.
Et là aussi, c'est totalement illogique. Car cela tendrait à prouver que cette installation n'est pas faite pour perdurer. Alors que le reste du site, les bâtiments et la rampe de lancement eux, sont réalisés pour demeurer très longtemps. Le métis était intarissable.
-- Je me suis aussi rendu compte, reprit-il après avoir repris un verre, que le matériel pour lequel était destiné ce « CFC », était en réalité du matériel de cryoconservation de corps humains. C'est ainsi que l'a décrit Robert ETTINGER, l'homme qui créa le « Cryonics Institute », dans le Michigan.
Maggy et Gérard n'eurent pas à se forcer pour marquer leur étonnement.
Toutefois, en tant que journalistes, ils avaient déjà entendu parler de la cryoconservation.
Ils savaient que plusieurs personnes s'étaient faites cryostasées récemment.
Mais Moreno était performant sur le sujet. De plus il leur assura que le « Cryonics Institute » aurait actuellement en stock, 74 personnes et 44 animaux. Tous attendaient que la science ait suffisamment progressé dans le domaine médical, pour être réanimés, soignés et guéris.
Récemment, un autre groupe de chercheurs, aurait réussit à cryostaser des individus vivants pendant plusieurs mois. Ils les auraient tirés de leur sommeil par la suite, et après pas mal d'échecs, ils seraient parvenus à tous les réanimer… en aussi bonne forme qu'avant leur cryocongélation.
Fièrement, Moreno affirmait que le matériel utilisé ici, était la réplique exacte des machines décrites par Robert ETTINGER. C'est lorsqu'il se mit à en parler autour de lui que ses ennuis avaient commencés. Ils avaient été suivis par son renvoi pur et simple de la société.
Le métis avait remarqué entre autre, que les compartiments réservés à recevoir les futurs congelés étaient au nombre de plusieurs milliers. Le chiffre était très exactement de dix mille. Ils étaient prévus pour être désaccouplés du système.
Le but visait sans doute, le raccordement à d'autres unités de production ou de maintenance de froid dans le futur.
Il ne faisait désormais plus de doute pour Gérard, que Moreno détenait là, la clef du mystère. Les travaux de la société qui construisait le pas de tir étaient parfaitement légaux. Mais il semblait qu'ils étaient destinés vraisemblablement à servir une expédition spatiale devant durer plusieurs mois, ou années.
Ce soir-là, ils quittèrent l'Equatorien avec le sentiment qu'ils avaient énormément progressés.
Apparemment, les différents types de matériels utilisés en Afrique et en Amérique du sud, laissaient à supposer qu'ils ne poursuivaient pas le même but.
En Afrique, ils se contentaient de cellules congelées et ici c'était des corps qui étaient congelés.
-- Peut-on faire confiance à Moreno ?
-- In vino veritas»! répondit Maggy.
De retour à l'hôtel Antinea ils firent très soigneusement le point sur ce qu'ils venaient d'apprendre :
1) La Nasa, le Canada et une Société Privée, avaient créé, ici en Equateur, une société d'économie mixte, pour la mise en oeuvre et l'exploitation d'une base de lancement de vaisseaux, avec un décollage de type tout à fait révolutionnaire.
2) La Nasa et le Canada avaient laissé l'exploitation, à la dite Société mixte composée d'individus très fortunés… Si fortunés, que même le père de Maggy semblait en être exclu.
3) Ce cartel d'individus projetait d'envoyer dans le plus grand secret, des hommes (au moins dix mille), en état d'hibernation dans l'espace… et tout ceci dans un avenir très proche... avant 2030 très probablement.
Mais s'agissait-il d'un seul envoi ou bien en était-il prévu plusieurs ? Il était encore trop tôt pour se prononcer.
Et parallèlement, de l'autre côté de l'atlantique :
1) Un groupe de pays Européens construisait une base à Franceville au Gabon, dans le but d'y conserver un minimum de dix mille cellules (probablement d'origines humaines). Le tout ne constituant qu'un début de stockage, d'après ce que Gérard avait surpris lors de la fameuse rencontre du « G8 ».
2) La ville construite, à Franceville, ne peut espérer abriter plus de dix mille à quinze mille personnes. Elle est donc beaucoup trop grande pour accueillir la totalité des techniciens, des scientifiques accompagnés de leur famille et vraisemblablement trop petite pour recevoir les individus créés à l'aide de ces cellules…
Mais ces dernières devraient être beaucoup plus nombreuses ! La phrase :« les dix mille premiers prélèvements seront faits pour Franceville », le confirmait.
Selon cette estimation, dont le chiffre avait été utilisé lors du « G8 », par le petit groupe caché derrière une colonne des sous-sols, on pouvait donc sans se tromper, parler de plusieurs fois dix mille cellules… C'était énorme !
3) Les cellules prélevées et congelées ne devraient constituer qu'une réserve, et la ville ne devrait abriter qu'un échantillonnage de ces cellules.
Gérard et Maggy commençaient à se rendre compte que les deux opérations, n'avaient aucun rapport entre elles. Peut-être même s'ignoraient-elles ?
Le lendemain matin, ils se rendirent une dernière fois à la « Casa Del Alabado », voir le Docteur Velasco afin de le saluer avant leur départ, prévu pour le lendemain dans la journée. Ils déjeunèrent ensemble et ne se séparèrent que vers 15 heures.
Le séjour s'achevait. Leur retour n'était prévu que pour le lendemain dans la journée. Ils décident de rencontrer une dernière fois Moreno le soir même. Il avait peut-être d'autres informations à leur fournir.
Vers dix-neuf heures, lorsqu'ils pénétrèrent dans le restaurant, il leur sembla qu'il y avait plus d'ambiance que les jours précédents. Il était pourtant très tôt. Mais plusieurs consommateurs étaient déjà complètement « borracho perdido », c'est-à-dire ivres morts. Les clients parlaient fort et vite. Si fort et si vite, que Gérard avait de la peine à les comprendre. Moitié en Espagnol, moitié en Quichua, ils évoquaient la mort de quelqu'un.
Ne parvenant pas à savoir de qui il s'agissait, Gérard et Maggy finirent par se mettre à la même table que la veille. Dans le fond, le couple de métis était lui aussi, assis au même endroit que le soir précédent.
Le patron vint s'enquérir de leur commande et retourna derrière son comptoir. C'est à ce moment là qu'un incident se produisit.
Un des clients du bar, particulièrement éméché, se retourna, et s'écria.
-- Les voilà ! Ce sont eux ! Ils étaient avec José hier soir !
-- Asesinos, asesinos! Atraparlos, no los dejen salir! Ce qui signifiait :
Assassins, assassins ! Attrapez – les ! Ne les laissez pas partir !
Déjà, un groupe d'hommes se détachait du bar et venait à leur rencontre.
Gérard aperçut le couple de métis qui se levait précipitamment en prenant la tête des belligérants. Il criait encore plus fort que les autres.
-- Asesinos, asesinos ! Atraparlos » !
Maggy sans perdre son calme se leva vivement et cria.
-- Vite Gérard. J'ai l'impression qu'on nous réclame d'urgence dehors !
Ils se replièrent vers la sortie et s'éloignèrent rapidement. Pendant un court instant ils virent que la meute s'apprêtait à sortir à son tour.
La jeune métisse de la veille, complètement ivre, trébucha devant la porte.
Tout de suite, elle entraîna dans sa chute, son compagnon et le reste de la foule des énergumènes.
Devant ce méli-mélo de bras et de jambes, Maggy en profita pour traîner Gérard à sa suite, pour s'engouffrer dans un taxi et s'éloigner du bar.
Dans la voiture qui les ramenait à leur hôtel, ils réalisèrent qu'ils avaient échappés de justesse à un véritable lynchage en règle. Sans la réaction immédiate de Maggy et la chute inopinée de leurs adversaires, Dieu sait dans quel état ils seraient à cette heure-ci.
Ils comprenaient maintenant qui était mort ! C'était José Moreno. Et d'après le comportement des clients du bar, cela devait être de mort violente et non naturelle. Le couple de métis était parmi les plus déchaînés.
Pour des gens qui, d'après Moreno lui-même, ne connaissaient pas Moreno la veille, cela paraissait plus que bizarre !
José avait sans doute beaucoup trop parlé la veille de ses ennuis avec la fameuse Société Américaine. Il était donc fort probable que le couple ait quelque chose à voir avec cette mort. Les deux métis étaient peut-être même à l'origine de la révolte de ce soir.
Arrivés à l'hôtel, Gérard et Maggy décidèrent de quitter l'Antinea le soir même.
Ils firent leurs bagages en toute hâte et ils s'apprêtaient à partir lorsque le téléphone portable de Maggy sonna. Celle-ci se précipita et décrocha vivement.
-- Mademoiselle Pullman ? Nous sommes vos « Baby-sitters ».
Veuillez mettre le haut parleur de votre portable en marche pour que votre ami puisse écouter aussi.
La voie s'exprimait dans un Américain absolument parfait, avec une très légère pointe d'accent sud-américain.
-- Ce soir, vous avez échappé de justesse à un attentat. Ce matin même, José Moreno a été retrouvé mort, assassiné, poignardé. Sans la présence d'esprit in extrémis de ma partenaire, nous n'aurions pas pu vous protéger.
Pour votre sécurité, nous vous conseillons de ne pas dormir ici cette nuit dans votre suite. Comme nous avions prévu cette éventualité lorsque nous avons su que vous alliez approcher Moreno, une autre chambre, moins confortable mais plus sûre, a été retenue depuis avant-hier au second étage. C'est la « 214 », à droite en sortant de la cage d'escalier.
Dans dix minutes, à vingt et une heures exactement, prenez vos valises. Je suppose qu'elles sont déjà prêtes. Il n'y aura personne dans les couloirs. Fermez à clef la porte de votre suite. Et descendez au second étage, en empruntant les escaliers. La chambre « 214 » sera ouverte. Vers vingt et une heure trente, un repas vous sera servi. Nous vous appellerons sur votre portable, juste une minute avant.
Enfermez-vous jusqu'à demain. Nous vous réveillerons vers six heures du matin. Ne déballez pas vos bagages. Ne vous inquiétez surtout pas. Nous veillerons sur vous cette nuit. Bonsoir.
Il avait raccroché, Maggy et Gérard se regardèrent… Où avaient-ils déjà entendu cet accent ? Pourtant, le contact venait bien de ceux qu'ils appelaient leurs « Baby-sitters ». Comme ils avaient déjà utilisé le portable de Maggy, il n'y avait donc aucun doute sur l'identité de leurs correspondants.
A vingt et une heure zéro cinq, tout était terminé. Le déménagement n'avait pas duré plus de cinq minutes. Ils avaient bien trouvé la porte de la chambre « 214 », ouverte comme prévu. Enfin rassurée, Maggy reprit toute l'opération depuis le début.
-- Je me demande si les deux métis du bar étaient vraiment soûls ?
Lorsqu'ils se sont levés de leur table, ils avaient l'air très lucide ! Ce n'est qu'après avoir rejoint les autres convives, qu'ils se sont mis à hurler avec eux et à tituber. De plus, je trouve que cette voix au téléphone ressemble beaucoup à celle du métis d'hier soir.
Delpierre compléta son interprétation.
-- Et si l'on y regarde à deux fois, cette chute à la sortie du bar était un peu trop providentielle… Et même si la culbute de la femme paraissait accidentelle, celle du métis même soûl, pouvait être évitée. Je crois en effet que nous avons démasqué nos anges gardiens. Je suis ébloui… il n'y a rien à dire… Ils sont vraiment efficaces !
-- Oui, compléta Maggy, je crois que nous pouvons dormir tranquille cette nuit. On revient de loin. Bravo à nos anges gardiens ! L'idée de la seconde chambre à un étage différant, chapeau ! Il faudra s'en souvenir !
A vingt et une heures trente, un second appel téléphonique les prévenait que leurs repas arrivaient. Aussitôt, on frappa à la porte et une voix féminine en anglais se fit entendre derrière l'entrée.
-- Service d'étage. Please.
En ouvrant, Gérard vit qu'il avait affaire à la si jolie métisse du bar. Elle entra avec le chariot, et referma la porte derrière elle.
-- Bonsoir. Je suis Maria Hurtado. Mon mari Antonio et moi faisons partie du service de sécurité de l'ambassade des Etats-Unis en Equateur.
Nous sommes ce que l'on appelle des « agents dormants », et nous sommes activés par l'ambassade, lors de l'arrivée de personnalités américaines ou étrangères… que ce soit pour une mission de protection, ou de surveillance.
Votre père, mademoiselle Pullman, a contacté l'ambassade pour nous charger de votre protection. Nous sommes désolés pour la chambre… C'est la seule qui restait de libre et honnêtement nous ne pensions pas en avoir besoin.
Après quelques échanges de courtoisie, Maria les briffa pour leur retour. Ils avaient tout prévu. Pendant qu'ils dînaient, elle sortit de dessous la table de service, deux costumes masculins, sud-américains. Les longs cheveux bruns de Maggy n'étaient pas un obstacle au camouflage imaginé, bien au contraire.
-- Les costumes sont ceux « d'Otavalenos », du nom de la ville « Otavalo ». Ils sont fabriqués à vingt kilomètres de Quito, par des commerçants reconnus. Les vêtements traditionnels sont faits de pantalons et de chemises blanches… le tout est surmonté d'un chapeau qui s'accompagne toujours de longs cheveux noirs tressés.
Maria confectionna une natte pour Maggy et pour Gérard qui avait les cheveux courts, elle sortit une perruque noire se terminant par une longue tresse.
Puis, elle se saisit d'une petite boîte de cirage, qui contenant une poudre pouvant passer pour du henné, mais en plus foncé.
-- Dès demain, à votre réveil, vous vous en frictionnerez le visage et les mains… ceci pour vous noircir le teint. Mais avant, je vous demanderais, Mademoiselle Pullman, de vous passer cette crème dans les cheveux. Cela les rendra plus lumineux. Pour vous, Monsieur Delpierre, inutile d'en rajouter… la perruque est suffisamment brillante.
Si vous partez un peu après sept heures, le personnel du week-end qui ne vous connaît pas, vous prendra pour des commerçants « Otavalenos ». Une dernière chose encore… prenez soin de vous présenter seul à l'accueil, monsieur Delpierre. Si le physique de Mademoiselle Pullman peut tromper de loin les employés de l'hôtel, sa voix risquerait de la trahir. Quant à vous, voici de la noix de coca à mâcher pour masquer votre accent.
Dernières instructions : Vous réglerez la chambre « 214 ». Ne parlez pas, dite simplement « 214 » et surtout, réglé en espèces et recomptez votre monnaie, ces commerçants sont réputés pour leur suffisance envers tous ce qui n'est pas Otavalos et possèdent un sens développé de l'avarice. Puis vous prendrez un taxi pour le Mercadillo hôtel. Là, vous m'attendrez au bar. Je vous suivrais de près.
Antonio lui, sortira derrière vous. Il payera la note de votre suite, en en rendant la clef, clef que je vous demande de bien vouloir me donner maintenant.
Je n'ai plus qu'à vous dire : A demain. Ne craignez rien, tout ira bien. Au revoir.
Maria, son discours terminé, repartit silencieusement, comme elle était entrée.
<Maggy et Gérard se couchèrent sans se faire bercer, la journée avait été rude.
Demain serait un autre jour, et il fallait l'espérer, un peu moins agité !
QUITO (Equateur) mercredi 18/092009 : 20 heures.
Cette histoire de cryologie tracassait Delpierre. Jusqu’à maintenant, ils ne risquaient rien. Leur couverture était parfaite. Elle résista même à un contrôle, au musée Saint Louis. Le père de Maggy avait bien fait les choses. Jusque-là, tout était légal. La base de lancement, bien qu’inconnue du grand public, avait une existence licite.
Mais cette affaire de cryologie qui n’avait pas sa place ici, ne lui disait rien de bon. Au Gabon, leurs ennuis avaient commencés lorsqu’ils s’étaient approchés d’un peu trop près des « frigoristes ». Il ne tenait pas à commettre la même erreur.
Surtout que rien ne lui interdisait de penser qu’il puisse y avoir un lien entre eux.
Dans la journée, Maggy avait appelé son père sur son portable.
-- Hello, Daddy ! C’est Maggy… Au départ, tu nous avais promis deux « Baby-sitters » pour nous protéger pendant nos vacances… Gérard et moi n’avons encore vu personne. Tu es sûr qu’ils ne se sont pas évanouis dans la nature ? Ou encore qu’ils ne se sont pas trompés de colis à l’aéroport ?
-- Il n’y a aucun risque ! Ils m’appellent chaque jour à la même heure.
Ils m’ont même fait parvenir des photos de vous… Très réussies je dois dire ! Et tendres ! C’est pour quand le mariage ? Vois-tu ma chérie, ils sont tellement discrets qu’ils peuvent se fondre dans la foule à moins d’un mètre de vous... vous ne les remarqueriez même pas. Ce sont des pros. Ils sont à la hauteur. Tout ira bien. Soyez sans crainte !
A demi rassuré par ces paroles, le couple finit par se jeter dans la fosse aux lions. Sous couvert de dialogue avec de jeunes étudiants de derniers cycles, ils agirent comme à leurs habitudes dans les bars et brasseries, situés aux abords du campus.
Ils eurent l’idée de leur faire briller l’avantage qu’il y a à travailler pour le Ministère de la Culture… surtout aux States. Ils leur apprirent que, « justement », le Musée d’Art Amérindien de Saint Louis recherchait de jeunes spécialiste du précolombien. Les étudiants étrangers y seraient les bienvenus. Gérard alors, insensiblement, commença à se renseigner sur les débouchés locaux. Puis il dirigea tout doucement la conversation sur les spécialistes du froid.
De fil en aiguille, ils apprirent où se trouvait le fameux point de chute. L’un des étudiants se proposa même de les accompagner. Maggy se demandait si ce n’était pas tout simplement un pique-assiette, vu que c’étaient eux qui réglaient les notes depuis le début.
Delpierre, finit par les mettre en confiance, en leur racontant les soirées passées avec ses amis frigoristes parisiens. Il s’était fait passer pour un Américain ayant fait une partie de ses études en France.
D’abord tendu, le climat se réchauffa, sans jeu de mot, ce qui pourrait paraître un « comble » pour des spécialistes du froid. Vers la fin de cette première soirée, Gérard avait appris que la plupart d’entre eux travailleraient, à la fin de leurs études, pour cette société américaine. Elle les avait engagés pour la construction. Ils espéraient y rester ensuite, pour assurer la maintenanc
Un grand nombre d’eux partaient régulièrement. On ne les revoyait que pour les congés annuels. Tous semblaient ravis de leur nouvelle situation. Sauf un certain Moreno. C’était un des premiers à avoir été employé par la Compagnie et il aurait été renvoyé pour une banale affaire de vol. Depuis, l’homme n’avait plus de travail et traînait dans le quartier San Marco. Il y dépannait encore quelques chambres froides. Mais il passait plus de temps « à se torcher la gueule » à la Bodega, dans la « calle juan Rodriquez y Diego Almagro », qu’à bosser.
-- Si ce n’est pas malheureux de voir ça ! Un des meilleurs technicien du froid de la capitale ! Et tout ça pour un petit vol de rien du tout ! Quelle tristesse d’en arriver là... leur dit le patron indigné.
La Bodega était plus un bar qu’un restaurant. On y servait, pour le déjeuner et pour le dîner, un peu de cuisine simple et familiale. Deux ou trois tables se remplissaient difficilement. Le reste était occupé par des consommateurs qui buvaient plus d’alcool que de jus de fruit.
Ce soir-là, une dizaine d’habitués, femmes et hommes confondus, se pressaient au comptoir, devant une ligne de verres et de bouteilles. Les « Pilsener » et les « Club », les deux marques de bières les plus appréciées entourées de cendriers aux trois quart pleins, ornaient le dessus du zinc.
Tout ce petit monde parlait ou plutôt braillait, chantant à en rendre l’âme.
Les femmes n’étaient pas les dernières à se faire entendre.
Au bout du bar, José Moreno « s’envoyait » bière sur bière. En une heure, Maggy et Gérard en avaient dénombrées cinq. A cette allure-là, ils ne pourraient bientôt plus rien en retirer. Il était urgent d’intervenir vite, avant qu’il ne soit trop ivre.
Malheureusement, il y avait trop de monde autour de lui pour tenter une approche.
Tout à coup, Moreno demanda un jeu de cartes au patron et s’adressa à la cantonade :
-- Y a-t-il des clients pour une partie de carte ?
Apparemment, en plus de buveur, il était aussi joueur. Son plus proche voisin se déclarant « partant », ils se déplacèrent à l’autre bout du bar, là où il y avait moins de monde.
Maggy sauta sur l’occasion. Empoignant son verre vide, elle se rapprocha du comptoir et commanda une nouvelle tournée. Le bruit était tel, que le geste semblait parfaitement naturel. En attendant que le serveur s’exécute, elle se tourna vers les deux hommes.
-- C’est curieux comme jeu ! On peut donc jouer à deux ?
Moreno, remarquant l’accent américain, s’imagina sans doute qu’elle faisait partie de la société qui l’avait licencié. Il répondit assez froidement et à la limite de l’incorrection.
-- Et alors ? On joue comme on veut ! On est encore chez nous en Equateur !
Maggy utilisa son plus beau sourire.
-- Vous savez, si je vous demande ça, c’est uniquement parce qu’entre le musée, où nous travaillons, mon ami et moi, et notre vie au quotidien, nous n’avons guère le temps de nous divertir.
Complaisamment le deuxième joueur invita Gérard à venir se joindre à eux.
Pendant qu’il leur expliquait les règles, Moreno, semblant ronger son frein, parla vivement à son partenaire en patois « Quichua ». Il n’avait pas du tout envie de pactiser avec l’ennemi.
-- Mais que vas-tu t’imaginer ? Elle vient de te dire qu’ils bossaient pour un musée ! Ils n’ont rien avoir avec la boîte qui t’a viré. Lui répondit-il dans la même langue.
-- Au fait, continua-t-il en Espagnol… Pour quel musée travaillezvous ? Pour un musée Equatorien ?
Maggy et Gérard n’eurent plus qu’à se présenter et de conter la petite histoire de « Saint Louis », qui semblait si bien marcher.
Les deux joueurs avaient interrompu leur partie de carte. La conversation démarrait bien. Moreno encore un peu réticent, semblait moins agressif. Petit à petit il commença à se mêler à la conversation.
Pour finir de l’apaiser, Gérard proposa une autre tournée. A sa façon d’accepter, il vit qu’il n’y avait plus de malentendu.
Vers vingt et une heures, le deuxième homme, qui ne s’était pas encore présenté, prétendit qu’il avait à faire le lendemain, et s’en allât. Bien que Gérard n’encourage pas la façon qu’ont certaines personnes ont de boire plus que de raison, il en profita pour offrir une nouvelle tournée.
De toute façon, il savait qu’avec ou sans lui, l’homme allait continuer de boire. Et peu à peu, Moreno entre deux lampées de bière, en vint aux confidences.
Il pleurait presque ! Lui faire ça à LUI… lui qui n’avait jamais rien volé…
Parce qu’on avait voulu lui faire porter le chapeau… lui qui était un des meilleurs frigoristes de Quito, sorti le premier de sa promotion ! Dans la foulée, Moreno leur commenta les plus belles réalisations de sa carrière.
Maggy et Gérard compatissants, l’écoutaient sans oser l’interrompre. Il fallait le laisser venir de lui-même à faire des confidences sur le site…. Pour cela, il fallait d’abord qu’il vide son sac.
La soirée était déjà bien avancée. Jugeant qu’il était tard, et qu’ils n’en tireraient rien de plus pour ce soir, l’alcool commençant à faire son effet sur l’Equatorien, Maggy et Gérard décidèrent de lever le camp. Ils promirent à Moreno de repasser le lendemain.
Moreno était prêt à parler. C’était sûr. S’il y avait quelle chose à apprendre sur cette histoire de froid, c’était bien lui, l’homme de la situation. De plus, il semblait vraiment sincère au sujet de l’affaire du prétendu vol.
Pourquoi diable l’avait-on licencié ? Alors qu’apparemment c’est un très bon frigoriste ? Cette histoire de vol ne tenait pas debout. Il était plus que probable, que Moreno avait surpris quelque chose qu’il n’aurait pas dû apprendre ou voir.
Il faisait un temps de chien ce jeudi-là sur la capitale. Le thermomètre avait terriblement chuté… Déjà que Quito se trouvait à plus de deux mille huit cent mètres d’altitude… Contrairement au reste du pays, il y faisait en permanence plus frais. Entouré de volcans, le temps y était capricieux. Il y pleuvait souvent et la température n’excédait pas treize degrés, en moyenne !
Courageusement, Maggy avait voulu visiter la vieille ville. Le quartier colonial, vieux de cinq siècles, avait été reconstruit à l’identique sur les ruines de l’ancienne cité Inca…. Les autochtones l’avaient rasée lors de l’arrivée des conquistadors. Mais la météo capricieuse avait joué les troubles fêtes et en avait décidé différemment.
Pour se réchauffer, ils choisirent d’aller goûter à la Bodega le « lecro », cette fameuse « soupe » que tout Equatorien affectionne tout particulièrement. Ils se firent servir aussi un « pollo à la brasa ». Ce plat national consiste en une forte portion de poulet cuit à la braise, et servi avec des frites.
Le restaurateur, bien qu’ayant l’air surpris, prit leurs commande. Il leur précisa que pour la soupe, il n’y avait pas de problème vu qu’elle était servie à toute heure, mais pour le poulet, il fallait attendre un peu.
A peine étaient-ils installés à une table près du bar, que l’ex-partenaire de cartes de Moreno entra accompagné d’une ravissante Equatorienne. Ils s’attablèrent au fond de la salle. Delpierre comprit qu’ils ne voulaient pas être dérangés. Cinq minutes tard, alors que leur soupe n’était pas encore servie, Moreno entra. Gérard lui fit signe de les rejoindre, jusqu’à ce que celui-ci se rapproche de leur table.
-- Salut. Vous avez bien profité de votre journée ? Avec un temps pareil ! La remarque de l’autochtone ne manquait pas d’ironie.
-- Voulez-vous vous venir vous asseoir avec nous, et partager notre repas ? Lui demanda Maggy.
Moreno commanda un « lecro » et s’assit à son tour, à côté d’eux.
-- Vous ne prenez rien d’autre ? Mais c’est nous qui vous invitons, dit Maggy surprise.
-- Ah, vous les Américains, vous êtes marrants. J’ai l’impression que vous connaissez bien mal notre pays. Un « lecro » ça suffit bien !
Maggy regrettait déjà sa proposition. Leur interlocuteur n’était certainement pas aussi fortuné qu’eux. Et la façon de se restaurer des Equatoriens était sans doute en rapport avec l’épaisseur de billets qu’ils avaient en poche.
Mais quand le restaurateur revint avec les soupes, elle comprit sa méprise.
Le « lecro » était bien un potage, mais à lui seul, il valait bien tout un repas. Fait à base de pommes de terre, d’avocat, de fromage et de graines de lupin, ce plat, non seulement était plus que copieux, mais de plus vraiment excellant. Il pouvait faire office d’entrée, de plat de résistance et de dessert.
A ce moment-là, et à ce moment-là seulement, elle comprit la surprise du restaurateur, lorsqu’ils avaient passé leur trop copieuse commande. Naturellement, en bon commerçant, celui-ci s’était bien gardé de leur en faire la remarque.
-- Ton ami a l’air en bien charmante compagnie ? Dit Gérard à Moreno. Il adoptait le tutoiement de la veille, en lui désignant le couple de métis au fond de la pièce !
-- Ce n’est pas mon ami. Je ne l’avait encore jamais vu avant l’autre soir. La femme non plus d’ailleurs. Elle était là aussi, mais seule et à une autre table. C’est un rapide, ce mec, il n’a pas perdu de temps !
Tout doucement, Delpierre orienta la conversation sur la profession de Moreno… le « froid » ! Quand il parlait boutique, le métis était intarissable. Il leur expliqua sa passion pour les appareils de production de réfrigération. Et il leur fit tout un cours, sur les différents gaz employés en fonction de leurs applications finales.
Il leur décrivit, par exemple et dans le menu, la différence entre un fluide zéotropique et un zéotropique… La pompe à chaleur pour la clim d’une maison, n’utilise pas le même gaz que celui d’une chambre froide, d’une vitrine réfrigérée ou d’une patinoire.
Le « R407C » remplace le « R22 » dans les installations neuves de conditionnement d’air de petites puissances. Il y avait aussi le « R134a », le « R404A »…
Toutes ces appellations virevoltaient dans la bouche du métis… Tout y passait. Les explications techniques étaient difficiles à comprendre. Delpierre en arriva à regretter sa curiosité. Mais, il fallait accepter d’en passer par là s’il voulait arriver à ses fins.
-- C’est comme pour cette société Américaine qui m’employait… Je me suis rendu compte qu’ils utilisaient du « R408A » ! C’est illogique ! Il n’y a pas besoin de climatisation proprement dite… Une simple « VMC » (ventilation mécanique contrôlée) serait plus que suffisante dans cette région… De plus, je n’ai pas ou très peu vu de matériel pour climatisation.
Le « R408A » est un « HCFC », mis au point à la suite des accords de Montréal. Il est surtout réservé pour des utilisations d’entrepôts frigorifiques et de surgélations alimentaires. Mais surtout, il est réglementé dans le temps. Il devrait être remplacé dans les années 2030 ou 2035. Il ne sert que de transition au « R502 », qui est un « CFC », appelé à disparaître prochainement.
Et là aussi, c’est totalement illogique. Car cela tendrait à prouver que cette installation n’est pas faite pour perdurer. Alors que le reste du site, les bâtiments et la rampe de lancement eux, sont réalisés pour demeurer très longtemps. Le métis était intarissable.
-- Je me suis aussi rendu compte, reprit-il après avoir repris un verre, que le matériel pour lequel était destiné ce « CFC », était en réalité du matériel de cryoconservation de corps humains. C’est ainsi que l’a décrit Robert ETTINGER, l’homme qui créa le « Cryonics Institute », dans le Michigan
Maggy et Gérard n’eurent pas à se forcer pour marquer leur étonnement.
Toutefois, en tant que journalistes, ils avaient déjà entendu parler de la cryoconservation.
Ils savaient que plusieurs personnes s’étaient faites cryostasées récemment.
Mais Moreno était performant sur le sujet. De plus il leur assura que le « Cryonics Institute » aurait actuellement en stock, 74 personnes et 44 animaux. Tous attendaient que la science ait suffisamment progressé dans le domaine médical, pour être réanimés, soignés et guéris.
Récemment, un autre groupe de chercheurs, aurait réussit à cryostaser des individus vivants pendant plusieurs mois. Ils les auraient tirés de leur sommeil par la suite, et après pas mal d’échecs, ils seraient parvenus à tous les réanimer…
en aussi bonne forme qu’avant leur cryocongélation.
Fièrement, Moreno affirmait que le matériel utilisé ici, était la réplique exacte des machines décrites par Robert ETTINGER. C’est lorsqu’il se mit à en parler autour de lui que ses ennuis avaient commencés. Ils avaient été suivis par son renvoi pur et simple de la société.
Le métis avait remarqué entre autre, que les compartiments réservés à recevoir les futurs congelés étaient au nombre de plusieurs milliers. Le chiffre était très exactement de dix mille. Ils étaient prévus pour être désaccouplés du système.
Le but visait sans doute, le raccordement à d’autres unités de production ou de maintenance de froid dans le futur.
Il ne faisait désormais plus de doute pour Gérard, que Moreno détenait là, la clef du mystère. Les travaux de la société qui construisait le pas de tir étaient parfaitement légaux. Mais il semblait qu’ils étaient destinés vraisemblablement à servir une expédition spatiale devant durer plusieurs mois, ou années.
Ce soir-là, ils quittèrent l’Equatorien avec le sentiment qu’ils avaient énormément progressés.
Apparemment, les différents types de matériels utilisés en Afrique et en Amérique du sud, laissaient à supposer qu’ils ne poursuivaient pas le même but.
En Afrique, ils se contentaient de cellules congelées et ici c’était des corps qui étaient congelés.
-- Peut-on faire confiance à Moreno ?
-- In vino veritas»! répondit Maggy.
De retour à l’hôtel Antinea ils firent très soigneusement le point sur ce qu’ils venaient d’apprendre :
1) La Nasa, le Canada et une Société Privée, avaient créé, ici en Equateur, une société d’économie mixte, pour la mise en oeuvre et l’exploitation d’une base de lancement de vaisseaux, avec un décollage de type tout à fait révolutionnaire.
2) La Nasa et le Canada avaient laissé l’exploitation, à la dite Société mixte composée d’individus très fortunés… Si fortunés, que même le père de Maggy semblait en être exclu
3) Ce cartel d’individus projetait d’envoyer dans le plus grand secret, des hommes (au moins dix mille), en état d’hibernation dans l’espace… et tout ceci dans un avenir très proche... avant 2030 très probablement.
Mais s’agissait-il d’un seul envoi ou bien en était-il prévu plusieurs ? Il était encore trop tôt pour se prononcer.
Et parallèlement, de l’autre côté de l’atlantique :
1) Un groupe de pays Européens construisait une base à Franceville au Gabon, dans le but d’y conserver un minimum de dix mille cellules (probablement d’origines humaines). Le tout ne constituant qu’un début de stockage, d’après ce que Gérard avait surpris lors de la fameuse rencontre du « G8 ».
2) La ville construite, à Franceville, ne peut espérer abriter plus de dix mille à quinze mille personnes. Elle est donc beaucoup trop grande pour accueillir la totalité des techniciens, des scientifiques accompagnés de leur famille et vraisemblablement trop petite pour recevoir les individus créés à l’aide de ces cellules…
Mais ces dernières devraient être beaucoup plus nombreuses ! La phrase :
« les dix mille premiers prélèvements seront faits pour Franceville », le confirmait.
Selon cette estimation, dont le chiffre avait été utilisé lors du « G8 », par le petit groupe caché derrière une colonne des sous-sols, on pouvait donc sans se tromper, parler de plusieurs fois dix mille cellules… C’était énorme !
3) Les cellules prélevées et congelées ne devraient constituer qu’une réserve, et la ville ne devrait abriter qu’un échantillonnage de ces cellules.
Gérard et Maggy commençaient à se rendre compte que les deux opérations, n’avaient aucun rapport entre elles. Peut-être même s’ignoraient-elles ?
Le lendemain matin, ils se rendirent une dernière fois à la « Casa Del Alabado », voir le Docteur Velasco afin de le saluer avant leur dépar, prévu pour le lendemain dans la journée. Ils déjeunèrent ensemble et ne se séparèrent que vers 15 heures.
Le séjour s’achevait. Leur retour n’était prévu que pour le lendemain dans la journée. Ils décident de rencontrer une dernière fois Moreno le soir même. Il avait peut-être d’autres informations à leur fournir.
Vers dix-neuf heures, lorsqu’ils pénétrèrent dans le restaurant, il leur sembla qu’il y avait plus d’ambiance que les jours précédents. Il était pourtant très tôt. Mais plusieurs consommateurs étaient déjà complètement « borracho perdido », c’est-à-dire ivres morts. Les clients parlaient fort et vite. Si fort et si vite, que Gérard avait de la peine à les comprendre. Moitié en Espagnol, moitié en Quichua, ils évoquaient la mort de quelqu’un.
Ne parvenant pas à savoir de qui il s’agissait, Gérard et Maggy finirent par se mettre à la même table que la veille. Dans le fond, le couple de métis était lui aussi, assis au même endroit que le soir précédent.
Le patron vint s’enquérir de leur commande et retourna derrière son comptoir. C’est à ce moment là qu’un incident se produisit.
Un des clients du bar, particulièrement éméché, se retourna, et s’écria.
-- Les voilà ! Ce sont eux ! Ils étaient avec José hier soir !
-- Asesinos, asesinos! Atraparlos, no los dejen salir! Ce qui signifiait :
Assassins, assassins ! Attrapez – les ! Ne les laissez pas partir !
Déjà, un groupe d’hommes se détachait du bar et venait à leur rencontre.
Gérard aperçut le couple de métis qui se levait précipitamment en prenant la tête des belligérants. Il criait encore plus fort que les autres.
-- Asesinos, asesinos ! Atraparlos » !
Maggy sans perdre son calme se leva vivement et cria.
-- Vite Gérard. J’ai l’impression qu’on nous réclame d’urgence dehors !
Ils se replièrent vers la sortie et s’éloignèrent rapidement. Pendant un court instant ils virent que la meute s’apprêtait à sortir à son tour.
La jeune métisse de la veille, complètement ivre, trébucha devant la porte.
Tout de suite, elle entraîna dans sa chute, son compagnon et le reste de la foule des énergumènes.
Devant ce méli-mélo de bras et de jambes, Maggy en profita pour traîner Gérard à sa suite, pour s’engouffrer dans un taxi et s’éloigner du bar.
Dans la voiture qui les ramenait à leur hôtel, ils réalisèrent qu’ils avaient échappés de justesse à un véritable lynchage en règle. Sans la réaction immédiate de Maggy et la chute inopinée de leurs adversaires, Dieu sait dans quel état ils seraient à cette heure-ci.
Ils comprenaient maintenant qui était mort ! C’était José Moreno. Et d’après le comportement des clients du bar, cela devait être de mort violente et non naturelle. Le couple de métis était parmi les plus déchaînés.
Pour des gens qui, d’après Moreno lui-même, ne connaissaient pas Moreno la veille, cela paraissait plus que bizarre !
José avait sans doute beaucoup trop parlé la veille de ses ennuis avec la fameuse Société Américaine. Il était donc fort probable que le couple ait quelque chose à voir avec cette mort. Les deux métis étaient peut-être même à l’origine de la révolte de ce soir.
Arrivés à l’hôtel, Gérard et Maggy décidèrent de quitter l’Antinea le soir même.
Ils firent leurs bagages en toute hâte et ils s’apprêtaient à partir lorsque le téléphone portable de Maggy sonna. Celle-ci se précipita et décrocha vivement.
-- Mademoiselle Pullman ? Nous sommes vos « Baby-sitters ».
Veuillez mettre le haut parleur de votre portable en marche pour que votre ami puisse écouter aussi.
La voie s’exprimait dans un Américain absolument parfait, avec une très légère pointe d’accent sud-américain.
-- Ce soir, vous avez échappé de justesse à un attentat. Ce matinmême, José Moreno a été retrouvé mort, assassiné, poignardé. Sans la présence d’esprit in extrémis de ma partenaire, nous n’aurions pas pu vous protéger.
Pour votre sécurité, nous vous conseillons de ne pas dormir ici cette nuit dans votre suite. Comme nous avions prévu cette éventualité lorsque nous avons su que vous alliez approcher Moreno, une autre chambre, moins confortable mais plus sûre, a été retenue depuis avant-hier au second étage. C’est la « 214 », à droite en sortant de la cage d’escalier.
Dans dix minutes, à vingt et une heures exactement, prenez vos valises. Je suppose qu’elles sont déjà prêtes. Il n’y aura personne dans les couloirs. Fermez à clef la porte de votre suite. Et descendez au second étage, en empruntant les escaliers. La chambre « 214 » sera ouverte. Vers vingt et une heure trente, un repas vous sera servi. Nous vous appellerons sur votre portable, juste une minute avant.
Enfermez-vous jusqu'à demain. Nous vous réveillerons vers six heures du matin. Ne déballez pas vos bagages. Ne vous inquiétez surtout pas. Nous veillerons sur vous cette nuit. Bonsoir.
Il avait raccroché, Maggy et Gérard se regardèrent… Où avaient-ils déjà entendu cet accent ? Pourtant, le contact venait bien de ceux qu’ils appelaient leurs « Baby-sitters ». Comme ils avaient déjà utilisé le portable de Maggy, il n’y avait donc aucun doute sur l’identité de leurs correspondants.
A vingt et une heure zéro cinq, tout était terminé. Le déménagement n’avait pas duré plus de cinq minutes. Ils avaient bien trouvé la porte de la chambre « 214 », ouverte comme prévu. Enfin rassurée, Maggy reprit toute l’opération depuis le début.
-- Je me demande si les deux métis du bar étaient vraiment soûls ?
Lorsqu’ils se sont levés de leur table, ils avaient l’air très lucide ! Ce n’est qu’après avoir rejoint les autres convives, qu’ils se sont mis à hurler avec eux et à tituber. De plus, je trouve que cette voix au téléphone ressemble beaucoup à celle du métis d’hier soir.
Delpierre compléta son interprétation.
-- Et si l’on y regarde à deux fois, cette chute à la sortie du bar était un peu trop providentielle… Et même si la culbute de la femme paraissait accidentelle, celle du métis même soûl, pouvait être évitée. Je crois en effet que nous avons démasqué nos anges gardiens. Je suis ébloui… il n’y a rien à dire… Ils sont vraiment efficaces !
-- Oui, compléta Maggy, je crois que nous pouvons dormir tranquille cette nuit. On revient de loin. Bravo à nos anges gardiens ! L’idée de la seconde chambre à un étage différant, chapeau ! Il faudra s’en souvenir !
A vingt et une heures trente, un second appel téléphonique les prévenait que leurs repas arrivaient. Aussitôt, on frappa à la porte et une voix féminine en espagnol se fit entendre derrière l’entrée.
-- Service d’étage. Please.
En ouvrant, Gérard vit qu’il avait affaire à la si jolie métisse du bar. Elle entra avec le chariot, et referma la porte derrière elle.
-- Bonsoir. Je suis Maria Hurtado. Mon mari Antonio et moi faisons partie du service de sécurité de l’ambassade des Etats-Unis en Equateur.
Nous sommes ce que l’on appelle des « agents dormants », et nous sommes activés par l’ambassade, lors de l’arrivée de personnalités américaines ou étrangères… que ce soit pour une mission de protection, ou de surveillance.
Votre père, mademoiselle Pullman, a contacté l’ambassade pour nous charger de votre protection. Nous sommes désolés pour la chambre… C’est la seule qui restait de libre et honnêtement nous ne pensions pas en avoir besoin.
Après quelques échanges de courtoisie, Maria les briffa pour leur retour. Ils avaient tout prévu. Pendant qu’ils dînaient, elle sortit de dessous la table de service, deux costumes masculins, sud-américains. Les longs cheveux bruns de Maggy n’étaient pas un obstacle au camouflage imaginé, bien au contraire.
-- Les costumes sont ceux « d’Otavalenos », du nom de la ville « Otavalo ». Ils sont fabriqués à vingt kilomètres de Quito, par des commerçants reconnus. Les vêtements traditionnels sont faits de pantalons et de chemises blanches… le tout est surmonté d’un chapeau qui s’accompagne toujours de longs cheveux noirs tressés.
Maria confectionna une natte pour Maggy et pour Gérard qui avait les cheveux courts, elle sortit une perruque noire se terminant par une longue tresse.
Puis, elle se saisit d’une petite boîte de cirage, qui contenant une poudre pouvant passer pour du henné, mais en plus foncé.
-- Dès demain, à votre réveil, vous vous en frictionnerez le visage et les mains… ceci pour vous noircir le teint. Mais avant, je vous demanderais, Mademoiselle Pullman, de vous passer cette crème dans les cheveux. Cela les rendra plus lumineux. Pour vous, Monsieur Delpierre, inutile d’en rajouter… la perruque est suffisamment brillante.
Si vous partez un peu après sept heures, le personnel du week-end qui ne vous connaît pas, vous prendra pour des commerçants « Otavalenos ». Une dernière chose encore… prenez soin de vous présenter seul à l’accueil, monsieur Delpierre. Si le physique de Mademoiselle Pullman peut tromper de loin les employés de l’hôtel, sa voix risquerait de la trahir. Quant à vous, voici de la noix
de coca à mâcher pour masquer votre accent.
Dernières instructions : Vous réglerez la chambre « 214 ». Ne parlez pas, dite simplement « 214 » et surtout, réglé en espèces et recomptez votre monnaie, ces commerçants sont réputés pour leur suffisance envers tous ce qui n’est pas Otavalos et possèdent un sens développé de l’avarice. Puis vous prendrez un taxi pour le Mercadillo hôtel. Là, vous m’attendrez au bar. Je vous suivrais de près.
Antonio lui, sortira derrière vous. Il payera la note de votre suite, en en rendant la clef, clef que je vous demande de bien vouloir me donner maintenant.
Je n’ai plus qu’à vous dire : A demain. Ne craignez rien, tout ira bien. Au revoir.
Maria, son discours terminé, repartit silencieusement, comme elle était entrée.
Maggy et Gérard se couchèrent sans se faire bercer, la journée avait été rude.
Demain serait un autre jour, et il fallait l’espérer, un peu moins agité !
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