L\\\'Enfant qui venait du futur

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Emilie. Mercredi 06/07/2011; Le risque

 

Euromarktinteractive.org, le seul journal trimestriel européen sur l'Art et la Culture (en 15 langues).

 

 

 

 

Une heure vient de s'écouler. La sonnerie stridente retentit dans l'entrée.

 

--  Allo ! Dit Emilie dans l'interphone. Elle n'attend pas la réponse et appuie sur le bouton d’ouverture de l’entrée, pour ouvrir à Jules la porte de l'immeuble. Elle l'entend grimper les escaliers quatre à quatre. Il s'arrête sur le palier. Elle entend Mimi lui crier = «  N'ouvre pas ».

 

 

Mais elle ouvre avant de comprendre ce que lui crie son Cyber-Cerveau. Ferré se tient devant elle…. Elle n'a pas le temps de faire un geste. Il entre et deux hommes entrent derrière lui. Ils fouillent l'appartement, prennent les dossiers, et descellent du mur le pauvre Cybor, ordinateur simple-première génération moderne. Dans la chambre, ils se saisissent d’Emilie qui a toujours Mimi à son poignet, avec tout l'attirail placé sur la table de nuit, lunettes, réveil, et répondeur compris. Ils emportent le tout et Emilie avec, pour monter dans une voiture garée sur le trottoir.

 

 

Le trajet est long. Ferré ne répond pas aux questions de la jeune fille. Quand ils arrivent devant une grande bâtisse aux volets fermés, il est déjà bien tard. La lune éclaire trois voitures stationnées sur le terre plein et un hélicoptère posé sur la pelouse. Le groupe se dirige vers l'intérieur.

 

 

Dans le salon, un grand feu crépite malgré la douceur de la nuit. Des lampes en forme de Bougie, allumées un peu partout, éclairent la scène insolite de cinq personnages. Une femme et quatre hommes en tenue de soirée, sont installés sur le divan, face aux arrivants. La troupe tire derrière elle, Emilie toujours en peignoir de nuit. Un type, grand, les tempes grises, habillé de gris se tient à l'écart.

 

 

On fait asseoir la jeune fille sur un fauteuil et une sorte d'interrogatoire commence. Au début, Ferré répond pour elle. Il donne les détails. Il raconte à l'assistance comment les sbires du Commandant Bar ont neutralisé un individu payé par on ne sait qui, sans doute des opposants du Consortium Génium, venus pour l'espionner au travers de la Paléosoft.

 

 

Emilie comprend que le Commandant en question est celui qui l'observe du fond de la pièce.     Un ensemble d'appareils sophistiqués est surveillé par une femme et un jeune homme en blouse blanche. Ferré place Emilie au centre des machines et continue son exposé :

 

 

--    L'espion s'est débattu et dans la bagarre a perdu un de ses bras avant de mourir. Nous n'avons donc malheureusement pas pu l'interroger. Nous avons été obligés de le cacher dans le placard à ordure d'Aldo Chomet, le locataire du premier étage. Nous pensons que la jeune fille possède plus qu'un simple programme d'investigation. Cette IA/P  qu'elle nous décrit est plus puissante que ce qu'elle veut bien nous en révéler.

 

 

En effet, la transformation du Délégué Européen, grâce à l'application de l'appareil - test, a été un succès. Il a réussi, contre toute attente à manipuler en notre faveur, les opposants du Plan Allfood. Mais cette fille s'entête à nous cacher la vérité et à prétendre qu'elle ne sait rien de plus intéressant. Nous allons pouvoir vérifier ses dires avec le détecteur de mensonges du château, lequel  est plus que suffisamment performant.

 

                                                                                                                                                      

La femme se lève pour parler avec Ferré. Longue, sculpturale, elle a un visage fascinant. Des cheveux presque bleus à force d'être noirs, des yeux violets et une petite bouche rouge, gonflée, se retroussant sur les commissures, n'arrivent quand même pas à la rendre jolie, attirante, ou même féminine.

 

 

Bref, elle représente tout ce qu'Emilie a toujours eu en horreur. Un être se sachant  supérieur et sûr de l'être sur tous les plans, alors qu'il n'écoute que ses propres instincts. Les individus de cette sorte peuvent faire des ravages.

 

 

La jeune fille est placée sans ménagement, sur le siège du détecteur. On lui a mis ses lunettes sur le nez. Ses bras sont encerclés et fixés contre les accoudoirs. Des électrodes sont  collés sur son front. Elle entend, venant d'un carton situé dans l'ombre, sur une table en recoin,      un bourdonnement. Une onde plus magnétique que sonore est en train de lui transmettre des impulsions auditives non reconnaissables.

 

 

--  C'est Mimi ! Pense-t-elle.

 

 

Avec horreur, elle sent ses cheveux se dresser électriquement de quelques centimètres au dessus de sa tête. Elle sait que sa machine est en marche. Pourvu que personne ne s'en aperçoive! Mais, confiante en la prudence de son double électronique, elle se rassure. Celle-ci a dû mettre en place la protection anti-radiation qui tapisse l'intérieur de son boîtier. L'ensemble ne ressemble qu'à une simple montre bracelet, résonnant en tamtam sur des supports d’acier placés dans une boîte d’emballage.

 

 

--  Mais ils ne pourront jamais deviner ce qui se cache à l'intérieur de ma montre, se console-t-elle. Toutefois, elle regrette de ne pouvoir communiquer télépathiquement avec sa chère  IA/P, malgré tous les efforts de celle-ci. Elle aimerait tant pouvoir lui envoyer des messages par radar, ou par transmission de pensée. Seules des impulsions répétées sur ses branches de lunettes, lui parviennent sans signification précise. " Trait. Point. Trait. Trait. Point "  :     -- . --  --  .

 

 

Tout à coup, elle réalise l'incroyable! Mimi est en train de la contacter, par des pressions électromagnétiques sur ses tympans, « EN  LANGAGE  MORSE ! »

 

--   Heureusement que j'ai fait beaucoup de voilier. Trait, point, trait, trait, point  -- ° -- -- °

D'accord. Presque sans effort, elle traduit le langage de Mimi :

 

 

--  Ne t'affole pas. Personne d'autre que toi ne peut recevoir mes messages. Je comprends TOUT ce que tu penses. N'oublie pas que MOI, je sais lire tes pensées, par la photosynthèse évolutive des circuits de tes hémisphères cérébraux.

 

 

J'ai déjà court - circuité le détecteur de mensonges. C'est un instrument des plus simples.     Il témoignera de ce que je lui dirai de reconnaître en fonction des observations que je pourrais faire sur les états dynamiques des personnes présentes.

 

 

L'atmosphère qui les entoure toutes les deux est très tendue.

 

 

--  Quand à moi, je ne risque rien, ajoute-t-elle, en réponse à la pensée inquiète de son humaine jumelle. Tes lunettes sont débranchées et leur semblent ordinaires. Même un démontage minutieux de la monture ne montrera que quelques fils de branchement acoustique.

 

                                                                                                                                                      

Le tout a l'air d'un appareillage auditif pour augmenter le volume des sons émis aux alentours. Tu as fait un beau travail d'opération camouflage en me fabriquant. Conclut Mimi admirative !

 

 

Pendant ce temps, les hommes s'affairent autour de Cybor2 et des documents saisis chez la jeune fille. La grande femme parle fort avec Ferré. Sur le divan, le personnage le plus âgé étale sa forte corpulence. Le détecteur de mensonge se met en route. Machinalement, sur les conseils de Mimi, Emilie répond aux questions d'une voix geignarde et apeurée.

 

 

--  Non, je n'ai pas de renseignement particulier à faire au sujet de mon IA/P. C'est une machine interactive qui me permet de découvrir l'état dynamique dans lequel je me trouve et de consulter les données déjà enregistrées avec mes précédents Personnages Instantiels. Je l'appelle Intelligence Artificielle, parce qu'elle me permet de réfléchir plus vite. C'est tout. Tout en disant cela, elle regarde Cybor, comme étant cette merveille informatique qu'elle décrit.

 

 

--  Elle dit vrai, inscrit le détecteur sur l'écran.

 

 

--  Bravo Mimi, pense fortement Emilie.

 

 

--  Tu n'as pas besoin de crier mentalement, répond sa machine. Tu fais des efforts pour rien. Ménage-toi. J'ai à te communiquer le nom des principaux personnages ici présents. Je reconnais quatre d'entre eux, d'après les photos saisies sur le site " Protosynthèse Confidentiel ", recensant les Principaux Hypercerveaux de notre Planète. Ils font partie de la catégorie « sans valeur morale », bien sûr. Je n’ai pas encore répertorié ceux qui veulent œuvrer en faveur de la Planète et de l’humanité, hélas !

 

 

--  Non, je n'ai pas d'autre machine en construction, continue à répondre Emilie à Ferré, en pleurnichant et en balbutiant. Je vous ai tout dit.

 

 

--  Elle dit vrai, retape le traitement de texte du « contrôleur » de mensonge sur la feuille transparente.

 

 

Pendant ce temps là, Mimi toujours en Morse, donne à Emilie le curriculum vitae, le CV détaillé des personnes en place.

 

 

--  Sur le canapé, explique la Super Machine, se trouve en premier à gauche, le canadien Allan APPERGAN d'Ecofinances DTX, que tu as reçu virtuellement en CDE avant-hier. Très beau gosse, quarante neuf ans, tu reconnais la dentition parfaite dont il nous avait gratifiées hier matin, photographiquement, et qu'il met encore en avant dans son sourire finement ironique.

 

 

C'est le Président Directeur Général de l'Administration du Fond Monétaire International de la Banque BRC pour la reconstruction et le développement commercial des Pays riches. De plus, il dirige la Caisse des Dépôts chargée des affaires des Trusts bancaires traitant avec le Tiers Monde, sous produit occulte du FMI. Au milieu, à côté de la femme qui est retournée s'asseoir au centre du divan, se trouve le gros Docteur Grégor HOSTREICHNER.

 

 

Tout à coup, le détecteur de mensonge s'emballe. Il crache des étincelles qui brûlent Emilie. Ce n'est pas très douloureux, mais elle en profite pour hurler et se tordre de souffrance. Elle espère impressionner l'assistance. C'est très réussi. Tout le monde s'affole. Ferré a l'air embêté.

                                                                                                                                                      

 

Le Docteur HOSTREICHNER demande de débrancher l'appareil. Mimi rigole en Morse  et continue les présentations.

 

 

--  Le Docteur est allemand. Diplômé de la Faculté de Hambourg, il est Conseiller Médical pour les Compagnies d'Assurances BIH, Belgium International Hospital, et les bases d'Aviation Air Californie. Membre d'Honneur de l'English Sociéty for Bariatric Physicians, il ajoute à ses activités le titre de Président Fondateur du Mondial Collège of New Nutrition, célèbre organisme spécialisé dans le traitement de l'obésité, les recherches sur le cancer, et le vieillissement.

 

 

Le Mondial Collège regroupe : 1) la Food Science Corporation Health Technical Institute. 2) La Bio Nutrition LTD-Médic-Eléctronic-Systèms. 3) Le Développement New Food. Le Docteur a aussi des responsabilités au sein des Sociétés Médicales Japonaises YU TU FY et Sud Afrique Hand Sida. Ses principales responsabilités se situent au niveau des labos de recherche, des médicaments, de l'écologie, de la nourriture OMG, de la génétique - ADN et de la diététique.

 

 

--  Assez ! Crie Emilie mentalement. Je n'en peux plus. Shunte un peu le son et essaye de me parler autrement qu'en Morse, je t'en prie. Je n'arrive plus à suivre !

 

 

--  Mon Dieu ! Du calme ! Respire un peu et écoute la suite. C'est important. En ce moment, comme ils te fichent la paix, profites-en.

 

 

En effet, les hommes arrivés avec Ferré s'affairent autours de Cybor 2. Ils le branchent sur des disques durs agrémentés d'imprimantes numériques. Il n'y a presque pas d'autre tension que l'énervement de la femme qu'APPERGAN appelle Cynthia. Elle s'agite en lançant de tous côtés des regards électriques.

 

 

-- Tiens, justement, venons-en à Cynthia ROTSHOTKIS, une russe d'origine danoise. Sa formation visait au départ l'Education Nationale. Bachelor of Business Administration, elle est aussi Master of Politic de State Berkeley. Elle a suivi l'Ecole Economique Brunsching et elle a une Maîtrise de Psychologie.

 

 

Pour peaufiner sa culture entre deux moments perdus elle a fait l'Ecole Supérieure de Journalisme de Stanford. Ses activités d'administrateur la placent comme Conseiller Technique auprès du Président des Etats - Unis. En fait, c'est elle qui le manipule.

 

 

Depuis un moment, personne ne s'occupe plus d'Emilie. Celle-ci en profite pour fermer les yeux comme si elle était épuisée. Mais en réalité, et bien qu'elle ne veuille pas se l'avouer, elle EST  épuisée. Inexorablement, Mimi continue.

 

 

--  A la gauche de la Russe remarquablement intelligente, mais sans aucune humanité, se trouve en milieu de divan le français François Claude CARNIER. Il a hérité du type argentin de sa mère, fille de l'ex Président PERROZA. Il sort de Polytechnique.

 

 

Il est Ingénieur Supérieur des Télécommunications de Pointe, Communications ondulatoires Electromagnétique. Cable. Internet. Satellite. Engénierie électronique. Il est Spécialiste de droit financier International dans les Affaires Juridiques du CNAV et du CNEF, Comité Normalisé des Ethiques Futures. C'est tout ce que je sais.

 

 

--  Ouf ! Soupire Emilie.

 

                                                                                                                                                       

-- Il ne reste plus que le chinois aux dents plus jaunes que son teint, situé en extrême droite du canapé. Il ne se trouve hélas sur aucune de mes fiches. Je n'ai pas eu le temps    de visualiser les papiers de sa poche intérieure de veste. J'ai seulement cru comprendre qu'il dirige une Secte, sorte de mafia internationale. Du fond de mon support de montre en rapport avec les montures d’acier du carton, et avec uniquement pour support physique mon double de boîtier relié Webcamement au petit ordinateur.fr de Lisbeth, je me sens limitée.

 

 

--  Quoi ! Hurle mentalement la jeune fille indignée ! Tu as mis Lisbeth au courant de mon enlèvement ?

 

 

--  Du calme, reprend « l'Intelligence – Machine » crachant du Morse telle une mitrailleuse,  inaudible pour tout autre personne, que pour sa correspondante. J'ai une bonne et une mauvaise nouvelle. La bonne, est que j'ai réussi à me mettre en rapport avec le matériel électronique artistique, musique et dessin de ta cousine, branché sur son Blog.  Après quelques bonnes impulsions, il m'a sorti un « fax – électronique » dernière génération, dans lequel il demandait à Lisbeth, de placer le CDE, double du mien sur son disque dur. C'est fait.

 

 

Et par chance, le bruit d'enclenchement de l'imprimante l'a réveillée. A l'heure actuelle, elle lit mes instructions. Elle est prête à nous aider, avec l’appui logistique des Delpierre. Elle m'a déjà demandé par portable, qui elle devait prévenir. La mauvaise nouvelle est que je ne le sais pas. Car, le malheur veut qu'il n'y ait personne de suffisamment fiable, sauf son groupe « Futurable3000 » et surtout capable, à l'heure actuelle de nous aider. Sauf elle.

 

 

Emilie a un sursaut d'effroi. Elle craint terriblement, connaissant sa cousine, que celle-ci  se mette en danger.

 

 

--  J'ai froid. Dit-elle tout haut, pour expliquer son frisson.

 

 

--  Elle dit vrai, dactylographie imperturbablement la machine détectrice de mensonges, qui entre temps avait été rebranchée.

 

 

--  On va s'arrêter là pour le moment, prononce sentencieusement le gros Allemand. Laissez-la dormir un peu. Vous pouvez la placer dans la suite dorée. Nous reprendrons plus sérieusement cette interrogation tout à l'heure.

 

 

--  Je demande une réunion d'urgence, dit le japonais. Pendant que le groupe s'installe autour de la grande  table de la salle jouxtant le salon, on emmène la kidnappée, flanquée de tout son matos, dont Mimi en montre bracelet, ses lunettes et Cybor2, dans une chambre luxueuse.

 

 

--  Ils espèrent que tu vas te précipiter sur l'ordinateur pour le manipuler, au risque de te trahir. Tu peux enlever tes lunettes maintenant. Cessons de parler en Morse. Dors un peu, pauvre carcasse fragile et dégradable. Pendant ce temps là, je vais travailler avec Lisbeth et son équipe.

 

 

-- Fais attention à ne pas les mettre en danger ! Moi, c’est déjà suffisant !

 

 

--  Rien à craindre. Dors. Je suis là.

 

 

--  C'est bien ce qui m'inquiète.

 

 

Epuisée, Emilie ferme enfin les yeux, juste au moment où le soleil se lève à l'horizon.


06/07/2011
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