Lisbeth. Jeudi 22/09/2011. Avez-vous un but dans la vie ?
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Je ne sais pas ce qui m’a pris cet après-midi, mais tout à coup, alors que nous nous rendions à un rendez-vous au sujet de la création de notre fameuse Ecole du Futur, j’ai eu envie de faire un peu d’improvisation en pleine rue. Un monsieur assez chic sortait d’un magasin et je me suis dirigée vers lui pour lui dire :
-- Nous sommes en train de faire une enquête pour un journal européen et je voudrais vous poser une question : Avez-vous un but dans la vie ? Le type ravi, m’a répondu immédiatement :
-- Oui. Mes parents avaient acheté cette boutique il y a cinquante ans. Mon frère et moi, avons acheté celle d’à côté et nous sommes en train de voir si nous pouvons lui adjoindre celle-ci pour nos enfants.
Pour la suite de l’enquête, je rajoutais dans la foulée :
-- Etes-vous heureux ? Et pour vous qu’est-ce que le bonheur ?
-- Oui, je vous remercie de me poser cette question. Je suis heureux de travailler avec succès. Et le bonheur pour moi, est de continuer à mettre ma famille en mesure de vivre par elle-même à l’abri du besoin.
Là dessus, j’ai remercié pour son amabilité mon premier interviewé, et nous nous sommes quittés ravis l’un de l’autre. Frank avait la bouche ouverte. Il voulait savoir d’où me venait cette nouvelle lubie de réaliser des interviews en direct, dans la rue, auprès d’inconnus. Et il voulait surtout savoir quand j’avais décidé du choix du sujet.
J’ai été obligée de lui dire que cela m’avait pris comme une lubie, et que je ne savais pas la minute d’avant que j’allais entreprendre cette enquête. J’en avais eu envie. C’est tout. Frank m’a crue. Je sentais que cette question du bonheur et surtout de savoir si les gens avaient un but dans leur vie, était de première importance. J’avais une fois de plus envie de me confronter aux mots, ces expressions qui me font vivre et me font dialoguer avec moi-même.
Je sais que tout est dans ce contact des gens les uns avec les autres. Il faut surtout se souvenir que la façon d’utiliser son vocabulaire, le ton, les intonations, et aussi le langage du corps sont très importants.
Cela me fait penser au travail que nous avons mis en route dernièrement, pour réaliser notre Ecole du Futur, avec l’aide du Dictionnaire approprié. Celui-ci traite entre autre, de la musicalisation de la parole, appelée « Portée Verbale ».
Ainsi par exemple, dans l’intention on trouve les degrés, la prononciation, sans oublier la voix avec son timbre, son étendue, ses modulations. Imaginons le travail d’un comédien. Cette activité va comporter, comme l’humour, plusieurs degrés :
a) Au premier, l’improvisateur parle et choisit de créer son texte le plus simplement possible. Il veut faire passer son message, directement sans subtilité.
b) Au deuxième degré, l’acteur introduit des finesses de jeu, qui serait pour le public comme un clin d’œil.
c) Avec le troisième degré, le jeu semble se dérouler au premier degré. Mais le regard vague que le comédien porte sur son action et sur son environnement, montre que celui-ci se délecte de la platitude de son action, ou alors qu’il s’en désintéresse. Il fait une sorte de clin d’œil au public, le faisant entrer dans son jeu.
En bref dans ce dernier cas, il se regarde se regarder et incite le spectateur à en faire autant. Ainsi, pendant que l’improvisateur fait une action, par exemple repeindre fictivement un mur ou tricoter des chaussettes, il tient un discours qui dément ses activités, ou qui souligne visuellement un détail non dit dans ses paroles. Le public ne s’y trompe pas. Il apprécie toujours la dissociation, source de gags et/ou de finesse.
Passons à la diction. En effet, la façon d’articuler est primordiale. La première règle est de bien prononcer pour bien se faire comprendre. Puis il est nécessaire d’accorder son élocution au message que l’on veut faire passer. Et enfin, il est intéressant de truffer son texte d’accents, d’expressions diverses, particulières, de locutions visant à situer et le personnage et ses origines.
La voix enfin. Les intonations, le timbre, l’étendue, la modulation de ce son qui sort de la bouche dictent le sens du texte prononcé. Une même phrase peut sortir de son contexte et peut vouloir dire tout le contraire, selon « l’air de la chanson ». Voici un exemple. En prononçant les mots suivants : « Bien sûr, tu as raison ». Cette simple constatation peut être méprisante, amusée ou admirative, amoureuse ou moqueuse, ou… etc. Il suffit de monter la note sur la dernière syllabe, de la moduler peut-être, ou au contraire de la baisser.
L’intention concerne non seulement les comédiens, mais aussi et surtout les éducateurs, les professeurs, les animateurs, les coaches, les parents, ainsi que les enfants, les élèves, les adolescents…. Tout être humain est concerné, que ce soit dans sa vie sociale, professionnelle,
ou familiale.
La musicalité de la voix ou « PORTEE VERBALE », est une méthode d’écriture vocale, venant en aide à tous ceux qui désirent être parfaitement compris. La partition va donner à l’utilisateur, la musique exacte que l’auteur, ou le réalisateur a prévue. Les signes indiquant les quarts, huitièmes ou seizième de tons sont extrêmement faciles à utiliser. On peut ainsi, donner des indications précises au sujet des textes.
La méthode propose également une notation portant sur le rythme, la hauteur, les pauses de la voix. Il devient alors possible par ce moyen, d’imposer ou tout au moins de suggérer des variations qui, par ces précisions dévoilent l’intention.
Comme pour une chanson, le texte écrit se trouve ainsi doté d’une portée démultipliée.Cela permet de réaliser ce chant modulé traduisant exactement les volontés du metteur en scène, des auteurs, et des individus ayant un message à faire passer de façon parfaite. Même livré à lui-même, le comédien, grâce à ces indications comprendra mieux son propre jeu et les atouts qu’il peut en tirer.
Mais pourquoi ne parler de cette méthode qu’aux gens de spectacle ?
Elle fut utilisée de nombreuses fois en Séminaires pour entreprises. Lorsque l’on se trouve devant un client, son patron, ses concurrents et même ses propres collègues, quoi de plus utile que de maîtriser professionnellement, non seulement sa diction, son langage bien sur, et éventuellement ses émotions, mais aussi et enfin, cerise sur le gâteau « l’intonation » reflétant l’intention ?
Car cet atout si précieux qui peut servir au boulot, est également efficace dans la vie privée, sociale, familiale, amicale et bien naturellement amoureuse. Des stages créés pour particuliers les utilisent avec bonheur. En effet, savoir ce que cache la phrase banale assénée par dessous la jambe, permet efficacement de parer au grain.
-- Tu as oublié le pain ? Peut vouloir dire selon le ton, l’intonation, les vibrations de la voix : « Imbécile » (si le son tombe en fin de phrase). Ou alors : « Mon pauvre !» (la question étant monocorde). Et encore : « Mon petit chéri », simplement en faisant zigzaguer la note principale du début à la fin.
Quel plaisir de dominer cette musique lourde de sens et de pouvoir la traduire à travers la langue d’autrui. Au delà du plaisir, se trouve le confort de comprendre mieux où l’on se trouve, pour déjouer les pièges cachés du double langage. Plus encore, nous avons enfin à chaque instant, la protection de cette connaissance qui nous alerte en cas de danger.
« Sur-jeu, sous-jeu, ton juste, sincérité, mensonge, timidité, arrogance, peur, tendresse, énervement», se lisent dorénavant avec la science de la mélodie vocale sur du simple papier à musique. Le déchiffrage d’un texte écrit s’accompagnera de l’écoute sur le parler d’autrui et surtout sur la gestion de son propre langage. L’avancée est immense, dès lors que le désir de manipulation est écarté.
On peut alors avoir sous la main, non seulement les notes placées sous le texte écrit en vue d’être joué, mais encore utiliser les signes musicaux des phrases utilisées le plus fréquemment en société, et surtout les explications indiquant le sens de telle ou telle modulation.
Cette note que je retrouve dans mes papiers de travail, me fait penser à préparer l’atelier de lundi prochain. Nous avons décidé Flora, Frank et moi, de l’axer sur la culture. Le titre étant : « Réflexion sur l’Art », j’ai envie d’apporter quelques dessins, mais surtout de lire un de mes textes sur la parole, justement.
Nous avons déjà une quinzaine d’inscrits parmi les principaux membres du « Groupe Futurable3000 ». J’ai hâte de voir ce que ce genre d’atelier peut apporter. Flora est d’accord pour présenter ses aquarelles, et Mike viendra avec les photos de ses sculptures. Chacun, artiste ou non, dira ce qu’il ressent et surtout ce que l’art en général, ou en particulier lui inspire.
Voilà le texte que je vais dire. Il parle des mots et de ce que je pense lorsque j’y pense. Je ne sais pas comment ils vont le comprendre.
Cela s’appelle = « LE PEUPLE DES MOTS », dont je suis le dictateur et l’esclave.
Ils sont devant moi, des milliers et je les appelle, les regroupe pour mon plaisir ému, amusé, apeuré aussi, car ils surgissent parfois à l’imprévu et se regroupent, se révoltent, me dominent, m’échappent.
J’aime leur grouillement sourd, leurs éclats de voix, leur jaillissement de fontaine. Je les sollicite, je les aime, je les adore, les mots de tous les jours, ceux du dimanche habillés de soie, les mystérieux, masqués comme au Carnaval, les pauvres, les simples… passe - moi le pain, les doux, les humbles… prends ton écharpe, ne me dis rien… les passionnés plein de flamme et qui frappent au détour d’une phrase... même les termes arides de technique, les questions volontaires des interviews, la poésie qui s’écorche avec l’oiseau trop vite blessé….
Je raffole des mots par dessus tout, mon cinéma, mon aventure, mes sorcières, ma surprise, ma force vive et ma douleur blessée, car ils sont comme moi et tous les autres. Ils vivent de leur propre vie et me la font partager. Ils me permettent d’échafauder des châteaux de papier se dressant devant moi par craquements secs et vivaces. Ils me donnent la vie de l’échange avec l’autre, ma mère, l’inconnu reçu dans sa bulle au détour d’une rue.
Au commencement, il n’y avait rien…. Le néant, une latence qui grandissait n’en finissant pas d’attendre, de mûrir, de devenir puissance de néant, d’exploser de sursaturation pour devenir chaos. De ce chaos sortit la création et toute chose prit forme, l’esprit, la matière, la lumière, la vie, avec le mot flèche de la parole qui forma l’œuvre de l’homme, la nourrissant de son lait.
Puis un jour, l’Univers à son tour explosera devenant sursaturation de puissance d’invention sa connaissance infinie le perdant encore, le sortant du néant comme cette phrase de mots devenus éblouissants de matière. Alors de nouveau nous attendrons ce « Peuple des mots » dont je suis le créateur et le captif.
Je crée ainsi leur assemblage magique, gracile et fort et ils me créent en boucle, chaque jour différent…. Je devrais dire différente, mais c’est autre chose alors… quelque chose de différent. Car c’est là que se trouve la merveille improvisée des mots tracés en quadrillé piquetés d’étoiles m’entraînant dans le tourbillon magique de leurs flammes. A eux tous, merci au petit peuple des mots, à cette planète voltigeant dans l’émotion de l’irréel.
Mais tout le monde n’est pas comme moi. Certains ne veulent pas apprendre à les affronter dès l’enfance, les apprivoisant, se les appropriant comme jouets. Seuls quelques effrontés vont plus tard entrer dans leur royaume, ce pays ou le Prince est un enfant.
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