L\\\'Enfant qui venait du futur

Emilie. Mercredi 22 juin 2011 Gabegie.

 

 

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Emilie se met à courir. Un camion faillit l'écraser pendant qu'elle pensait bêtement à ne pas oublier de téléphoner à sa mère. Dans cette panique pour traverser la rue, elle se donnait l'impression de vouloir fuir quelque chose.

 

Elle avait PEUR. Ce n'était pas une simple frayeur physique normale, comme celle de la nuit dernière, lorsqu'elle s'était réveillée avec ces cambrioleurs dans l'appartement. La sensation dégueulasse se situait dans son estomac. Commandée par la tête, celle-ci n'avait pas de cause précise. Un début de dépression se glissait sur ses épaules.

 

Elle avait pourtant l'habitude de gérer cette sorte de sensation, en bloquant l'Information négative dès l'arrivée de sa Proposition. Elle savait très facilement renverser la vapeur. Elle le faisait même inconsciemment. Elle allait tout simplement chercher, dans ses Mémoires, des Eléments positifs suffisamment forts pour contrecarrer la Donnée  démoralisante.

 

Cette fois-ci, elle privilégia malheureusement une image globale d'elle-même prise en fin de « Destructuration » de la Courbe. Ce cliché était terriblement Pessimiste - Destructif. Et, de plus, lorsqu'elle le représenta en début de Création de l'Instant suivant, non seulement elle le plaça dans trop de Mémoires, mais surtout elle accepta de le cristalliser avec de pernicieuses Fiches Mortes débilitantes.

 

Consciente du piège, elle fit un effort pour rejoindre une Phase Dynamique. En fermant les yeux, elle chercha désespérément des symboles positifs.

 

Perdue dans ses pensées, elle heurta un homme marchant sur le trottoir. En lui marmonnant un bref pardon, elle se mit à chercher à créer l'information d’une « excuse » plus aimable, avec des images autres que les figures négatives de la dépression. Mais elle n'y parvient pas. Alors, pour l'arrivée de la Proposition suivante, elle visionna son Circuit avec soin.

 

D’abord elle regarde l'entonnoir d'accès. Il était complètement encombré par des blocs de refus d'ouverture. Elle cherche aussitôt à le dégager. L'effort cérébral lui donnait un air farouche   et égaré. Hélas, le casier Acceptation avait mis un barrage de contrôle qui refusait la plupart des propositions positives, ne laissant passer que celles qui se rapportaient à la contrariété du choc  avec le passant.

 

Cela voulait dire qu'elle était imperméable à un environnement extérieur positif. Le Casier des Comparaisons n'acceptait que des Fiches négatives. Emilie en vit tout de même une, dans son cerveau, qui ne l'était pas.

 

C'était l'image du rayon de soleil de la seconde précédente. Elle la visionnait, enfin et pour une fois, de façon favorable. Elle la sélectionna…. Elle la compara à la Proposition écœurante de son pied cognant contre le trottoir pour récupérer son équilibre. Elle en fit une Fiche d'Amusement qu'elle créa, mais avec difficulté, et la plaça dans la Case Création.

                                                                                                                                            

Heureusement, elle arriva dans le casier de rangement suivant, à en tirer plusieurs      Copies positives. Elle les classa illico, dans le plus de Mémoires possibles, et rajouta une Image  Globale dynamique et joyeuse de cet Instant en train de se terminer.

 

Sauvée ! Elle visualisait, par la même occasion, où se situait ce début de spleen. L'idée    que Jules n'était pas prêt à la comprendre, l'avait démoralisée.

 

Lorsqu'elle reprit pied en regardant de nouveau lucidement autour d'elle, l'impression de nausée envahissant son estomac avait diminuée. Il était nécessaire de continuer l'exercice de  « Respiration/Contraction/Visualisation » de son Circuit. Ce n'était pas très commode à réaliser,   au milieu des passants affairés.

 

Il fallait désormais écarter les nombreuses Copies qui se présentaient en premier, car  celles-ci étaient toujours négatives. Elle devait donc transformer le Programme de Facilité, en un Programme de Rigueur. En effet, seul un choix rigoureux de la Fiche positive la meilleure, serait efficace pour une « Création Instantielle » valable. Elle eut encore beaucoup de mal à réussir l'opération.

 

Pendant le trajet de retour, elle combattit férocement une grande quantité de « Créations » pernicieuses. Entre autre, une haine contre Véra se présenta, ex abrupto….  Emilie voulait tout bonnement, lui casser la figure, chaque fois qu'elle pensait à l'attaque de cette nuit. Le contre-coup de l'agression se manifestait avec du retard. Elle était obligée d'effacer, seconde après seconde, les présentations négatives et de refuser de les présenter à nouveau.

 

Elle arriva à créer des Informations positives en « Comparaison/Ressemblance », entre les Eléments internes et les Propositions extérieures arrivant sans cesse : Bruits de voitures, de klaxon,  ou gargouillements personnels, digestifs, divers.

 

Finalement, ayant réparé en grande partie les mouvements dépressifs de son organisme,  elle entra dans son immeuble. En ouvrant la porte de la cave 47, elle découvrit, avec surprise, un désordre indescriptible. Le petit boîtier de Mimi trônait sur le bureau avec des antennes monstrueuses et des pinces articulées incrustées sur le côté. Emilie, dans un hoquet, eut un cri de panique :

--  Mimi ! Qu'est-ce que tu as fait !

           

--  Il était temps que tu arrives, répondit la Machine calmement. Je suis en train de me  créer une carcasse ayant un pouvoir sur le monde extérieur. Lorsque je suis seule, je suis sans défense. N'importe qui peut prendre ma petite boîte et partir avec. Tu n'étais pas là. Cela m'a donné à réfléchir. J'ai fait fonctionner l'imprimante de base de la cave et avec le scanner tridimensionnel, j'ai pu visualiser des images, dont j'ai réalisé les plans.

                                                                                             

Par hologramme, j'ai créé une onde de forme. Avec l'aide de l'aimant de réserve, j'ai amené jusqu'à moi, un camion benne, placé dans ta vieille caisse à jouets. Quand tu es arrivée, je venais juste de le poser sur mon enveloppe plastique. Mais ce n'est pas encore ça. Il faudrait que tu me fasses monter directement, sur mon support boîtier initial, des roues minuscules faites à me taille.

 

Cela me permettrait d'investir une carcasse plus grande, pouvant accomplir plusieurs tâches. Un robot quoi. Lorsque le besoin s'en fera sentir, je n'aurai plus qu'à me placer dedans. Au lieu d'être dans ta poche, je me mettrai au poste de commande de la machine.

                                                                                                                                            

Si tu m'en fabriques plusieurs de tailles différentes, je serai invincible en cas d'attaque.       Je pourrai nous défendre contre la terre entière.

 

--  Mon Dieu, murmura Emilie. Je crois rêver. C'est un cauchemar. J’ai envie de vomir.

 

--  Pourquoi? Puisque moi, c'est toi. Tu sais bien conduire une voiture, faire marcher une machine à laver, dicter une lettre informatique, ou programmer un magnétoscope. C'est pareil. Je peux faire de même. Ce ne sont que des machines. Mais moi aussi, j’en suis une.

 

Sauf, que je sais comment tu vas réagir. Je connais tes goûts, ta façon de cuire tes œufs à la coque, et à combien de degré tu dois laver ton petit linge. Je vois quelle sera ta réaction devant tel ou tel événement extérieur. Avec une tranche d'erreur bien sûr. Comme toi-même tu peux en avoir sur tes propres jugements et tes propres goûts…. Alors heureuse?

 

--  Je ne sais pas, balbutia Emilie. C'est tellement invraisemblable.

 

--  Je ne vois pas le problème. C'est toi qui m'as faite. Qu'y a-t-il de plus invraisemblable que la première invention de l'ordinateur. On va un peu plus loin. C'est tout. Et on n'a pas fini d'y aller, ajouta la boite à pinces qui ressemblait vaguement à un crabe aux antennes préhensibles.

 

Qu'en penses-tu? Tu vas m'aider à être entièrement autonome, non seulement dans mes raisonnements, mais encore dans mes gestes. C'est très simple. Cela pourra nous servir si tu es encore attaquée. Je pourrai venir à ton secours et broyer les poitrines des cambrioleurs avec mes grues en forme de bras.

 

--  Evidemment, reconnut Emilie. Mais pas maintenant. Nous ferons ces transformations tout à l'heure, après  le rendez-vous de travail avec Ferré.

 

--  Et puis tu me raconteras, toi aussi, ce que tu as fait, pendant que nous étions loin l'une de l'autre. Cela nous permettra d'ajuster nos Mémoires et d'en faire des expériences communes.  J'en ai besoin pour que mes statistiques soient mises à jour et deviennent de plus en plus fiables.

 

Bref, pour que je puisse raisonner comme toi et donc à ta place, ajouta-t-elle, il nous faut rester le plus souvent une et indivisible : Comme une entité « EMILIE – MIMI ». Sinon, en m'éloignant trop de tes pensées, je risque de devenir quelqu'un d'autre. Quoique ce soit impossible. Je me met à dire n’importe quoi.

 

--  Oui. C'est comme en amour. Plus tu t'éloignes, plus tu m'apprends à me passer de toi. Mais jusqu'où irons-nous dans cette affaire. Oh, Mimi, dis le moi, s'il te plait? Puisque tu raisonnes plus vite que moi. A toi de jouer.

 

--  Je ne raisonne pas plus vite. Je ne peux pas, moi machine, aussi performante que je sois, me comparer à  la vitesse complexe et quasi illimitée d'un cerveau humain. La seule différence entre vous et moi, c'est que vous ne connaissez pas assez la façon de vous gérer, contrôler. Oui, même toi, avec tes fonctionnements Luriens universels. A part ça, mes circuits électroniques ne sont pas plus performants que vos échanges neuronaux.

 

--  Que Dieu t'écoute.

--  A défaut de Dieu, MOI je t'écoute.



22/06/2011
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