L\\\'Enfant qui venait du futur

Thomas. Expédition.

 

 

 

 

 

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--  OH ! Hurle Léa.

 

Son cri de joie capté par son I.A.P. branché et accroché à son poignet, résonne dans tous les récepteurs amis, ouverts en permanence. Sur la liste se trouvent principalement ses trois copains, Milo, Pépé le nain, et bien sûr Thomas.

 

Réveillés en sursaut à sept heures du matin, ils s’indignent, chacun à sa manière. Milo et Pépé, qui dorment en logements familiaux, en font profiter les chambres contigues. Seul Thomas qui crèche depuis un an en habitation individuelle, se garde le bruit pour lui tout seul. 

 

Dans sa grande et lumineuse chambre éclairée par la paroi transparente, à peine recouverte de treillis métallique, il écarquille brusquement ses yeux ahuris. Secoué par le hurlement de Léa, c’est avec affolement qu’il lui répond. Il entend déjà les vociférations effrayées des deux autres copains, aussi inquiets que  lui.

 

--  Qu’est-ce qui te prends ? Es-tu en danger ?

 

Léa répond dans une grande excitation :

 

--  Non ! C’est Lister qui me souhaite mon anniversaire et pour cadeau, il nous offre un repérage en bulle dans l’espace, pour réceptionner dans une autre dimension, les messages du Commandant Sanders. Et vous venez aussi tous les trois. Si vous voulez, ajouta-t-elle.

 

Rassuré, Thomas ne réalise pas tout de suite sa joie précisée par un petit picotement dans le nez. Il entend pérorer Milo et Pépé. La conversation exacerbée de ses trois copains finit par le fatiguer. Il décide de prendre du recul et coupe le son.

 

--  Bon. Maintenant, on se re - allonge sur le lit confortablement. On respire profondément.  On lâche prise. On ne pense à rien….

 

Mais la nouvelle est trop top ! Un voyage dans l’espace, même si ce n’est qu’une petite  virée proche de la terre, est tout ce qu’il désire le plus au monde ! Il en a déjà réalisée une dans sa petite enfance, avec Madelonne, sa gardienne familiale. Il se souvient du moindre détail. Ils n’étaient partis que quelques heures et seulement à quelques centaines de milliers de kilomètres.

 

Mais l’aventure lui avait laissé des sensations si fortes qu’il en rêvait souvent la nuit, se revoyant flotter dans une sorte d’état d’apesanteur.

                                                                                                                                                      

Les voyageurs étaient au nombre de douze ce jour là. Combien seraient-ils cette fois-ci ? Thomas appela Lister et tout de suite, le contact s’établit. La voix de son adulte préféré, celui qui dirige la Cellule de Gestion de la Cité, lui répondit aussitôt.

 

--  Oui Thomas. Il n’est que sept heures du matin. Je suis désolé. Je sais bien que je t’ai réveillé par l’intermédiaire de Léa. Le départ n’est prévu que pour quatorze heures, mais avant il faut que je sache si tu es OK ? En effet, je ne fais pas partie du voyage.

 

Vous serez sous la direction de Dorky et de Cécile qui prendront chacun avec eux, un pré – ado. Clem va être de la partie et prendra avec lui, Léa. Je voulais savoir si tu acceptes d’être seul dans ta bulle spatiale. Aucun autre pré – ado n’en est capable.

 

Le « oui » de Thomas ressemblait à un hoquet.

 

--  L’expédition est composée de quatre œufs à deux places. Vous volerez en formation « open space », ce qui signifie que votre autonomie de conduite est assujettie à la direction d’une seule personne, soit Cécile, soit Dorky, en alternance. De temps en temps et pour un bref moment, vous pourrez vous diriger seul. N’oublie pas que votre mission est d’observer dans les moindres détails tout  ce qui peut nous aider dans la détection des messages de Sanders.

 

En attendant, l’heure du rendez-vous, devant le SAS, je vous conseille de vous détendre tous les quatre. Allez déjeuner au resto Sport. Prenez des forces, vous en aurez besoin. Vous aurez à traverser en voiture le terrain accidenté qui mène à la base de lancement située dans la montagne. Vous ne décollerez que demain à quatre heures du matin, c’est à dire en pleine nuit, pour faciliter les départs. La mission vise à repérer le pourquoi des messages de la fusée U.S. J’en ai déjà pour ma part, une petite idée. Je vous confirme que vous n’avez rien à préparer. Présentez-vous juste à l’heure, dans votre tenue habituelle. A plus tard.

 

Thomas respira un grand coup. Cela faisait déjà deux mois que ce Commandant Sanders, inconnu de tous, disait revenir prochainement sur terre et demandait de l’aide à la Ville Bulle.

 

Ses messages saccadés se répétaient toutes les cinq minutes, de la même façon et sans aucune variation. Le robot qui répétait sa litanie, semblait détraqué ou bloqué. En effet pourquoi ce même appel diffusé depuis si longtemps déjà ?

 

Thomas réfléchit intensément. Il se souvenait du début de l’histoire. Ils étaient alors dans la salle des Archives, avec ses amis, et l’annonce de l’arrivée d’une fusée américaine, partie  en 2027 sur une « Terra Planète », avait retenti dans la salle.

 

Léa avait prit peur. Elle se demandait si ces humains formés à cette vie de violence et de haine, de l’époque, n’allaient pas venir les perturber. Pis peut-être, les combattre pour réinstaller sur terre l’atmosphère de cruauté existant dans ces années là, et ce depuis le début des temps. Le mystère était non seulement passionnant, mais vital.

 

A neuf heures, les quatre préados se sont installés dans la salle du restaurant qui      donne sur la piscine d’un côté et sur les évolutions des férus de hockey sur glace, de l’autre. Leur énervement est perceptible. Un frisson de violente excitation les parcourt de la tête aux pieds. Leur secret est difficile à garder. Mais ils gardent une réserve totale. Non qu’ils soient obligés de taire cette formidable aventure qui les attend. Ils sentent simplement qu’ils ont besoin de tout leur calme pour aborder ce départ.

                                                                                                                                                      

Annoncer la nouvelle, ferait se  précipiter sur eux, une foule de copains avides de   recueillir leurs impressions. L’idée de les envier ne leur viendrait même pas. Le sentiment de puissance, de sélection, de supériorité par le choix n’existe pas dans la Ville De Lures. Il faut le répéter, Lures marche au nom d’une Logique universelle, rigoureuse, équilibrée et subjective.

 

Thomas pense que la passion qui circulerait dans les groupes surexcités, échaufferait bien trop leurs esprits, déjà bien assez échauffés comme ça. Les futurs voyageurs se contentent de se regarder avec des yeux brillants, en commentant les prouesses sportives qui se déroulent sous leurs yeux. Les mouvements des patineurs se lançant le palet, traçaient des raies de lumière sur la glace.

                                                                                                                       

Devant son plateau de fruits et de gâteaux au chocolat, Thomas rêve déjà à demain matin. Les ingrédients de son repas contiennent des compléments énergétiques, sans fruit, ni laitage. Ils ressemblent pourtant, à s’y méprendre, aux aliments ingurgités par les êtres humains ordinaires vivant dans les années deux mille en se nourrissant d’animaux et de plantes.

 

Cela se passait avant qu’ils ne soient tous remplacés ou presque, par les individus de la Ville Bulle. Maintenant, ceux-ci, clonés génétiquement avec le fameux gène de la photosynthèse, se nourrissent de lumière comme les plantes.

 

La faune et la flore, ainsi préservées, n’avaient plus alors aucune valeur commerciale. Elles cessèrent enfin d’être asservies par des humains qui, ayant renoncé à se battre pour l’argent, les biens de consommation, les honneurs, la puissance, ne connaissaient plus la violence.

 

Toutefois, pour que leurs systèmes digestifs puissent continuer à fonctionner, ils devaient absorber le même volume de nourriture et de boisson qu’autrefois.

 

Les cuisiniers célèbres de la Cité, qui travaillent uniquement par passion, puisque l’argent et le travail obligatoire pour vivre n’existent pas, font alors assaut d’ingéniosité et de talent, pour composer des festins fabuleux de canards laqués, de bœufs carottes, ou de dinde aux marrons, sans canard, bœuf, dinde, carotte, marron ; ou tutti quanti.

 

Les plats ne comportent plus rien de vivant, rien que du chimique qui, même succulent et copieux, ne possède pas d’ingrédient ayant connu la vie. Terminé l’asservissement du vivant.

 

Un regard sur son I.A.P. ou Intelligence Artificielle Personnelle, intégrée à sa montre bracelet, indique à Thomas qu’il a assez avalé de nourriture. Son organisme avait sa ration de dynamisant à base de fausses protéines animales, sous animales, et végétales, ajoutée à la lumière éclatante des parois de verre qui nourrissait son gène de la photosynthèse.

 

Il n’avait plus droit qu’à de l’eau, s’il ne voulait pas se gaver malencontreusement. Enervé, il aurait voulu mettre des patins pour réussir à se calmer en voltigeant sur la glace. Mais il fallait être raisonnable. Il le savait. Tout à l’heure, ils auraient besoin de toutes leurs forces pour attaquer le tout terrain accidenté, et ce jusqu’à la base de départ.

 

A quatorze heures pile, le petit groupe se retrouve devant le SAS intérieur, situé à côté de la cabine de Gestion de Lister. Dans les salles de passage vers l’air libre, ils mettent sur leur simple tenue deuxième peau, l’attirail nécessaire pour la grimpée, grosses chaussures, tenue de marche solide pour résister aux ronces, à la pluie possible, aux aléas du dehors.

 

Enfin prêts, ils quittent la Bulle, sa beauté, sa protection, son confort, sa liberté de vie, pour attaquer ce que  les humains d’autrefois affrontaient continuellement, dans la lutte pour une vie à la fois mal comprise et soit-disant menacée.

 

Thomas comprend bien, grâce à sa passion pour la Salle des Archives, combien son double espacé dans le temps, cette Lisbeth qu’il n’a connu que par son Blog de 2008, a du souffrir. Surtout si elle se souvient de la merveilleuse vie de Thomas, en 3012, qui fut peut-être sa propre vie à elle.

 

Sa propre vie à elle ? Mais qui peut le dire ?

 



07/10/2011
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