Lisbeth. Samedi 7 Février 2009. 17 heures. Réunion.
Lisbeth. Samedi 7 Février 2009. 17 heures. Réunion.
Oui, depuis Décembre, j’ai cessé de travailler sur ce blog qui remue tant de souvenirs. Je ne sentais pas du tout cette histoire. Ce n’est pas qu’elle m’emballe davantage aujourd’hui, mais j’ai honte de faiblir comme ça.
Dehors le jardin est tout blanc, il neige de nouveau. On a un hiver pourri cette année. Cela n’en finit pas. J’ai fait de nouveau un feu de cheminée. Je n’ai bientôt plus de bois. Je brûle quelques pieds de vieilles chaises. Il faut dire qu’entre l’opération de « Survie en milieu Urbain », que l’équipe habituelle sous couvert de Gauthier, a mené brillamment et le dîner de Noël en famille les quelques jours de repos que je m’étais octroyés ont passés comme l’éclair.
J’ai froid dès que je m’éloigne de plus de trois mètres des bûches incandescentes. Mon ordinateur est à l’autre bout de la pièce. Tant pis. Je VEUX avancer. Je me bagarre depuis l’âge de trois ans et maintenant que j’ai tout pour mettre un peu de clarté dans cette histoire, je baisserais les bras ? Non. Courage.
De quoi vais-je parler maintenant ? En évoquant Thomas, j’ai abordé le sujet de l’éducation, matière choisie par Léa en cours de perfectionnement. Il n’est pas facile pour un individu de l’époque actuelle de comprendre comment les bébés sont élevés.
Premièrement la famille n’existe pas. Forcément. Puisque les êtres sont issus de cellules clonées, ils ne connaissent pas leurs ascendants. Ils peuvent, s’ils le désirent, apprendre comment était leur ancêtre direct dont ils possèdent toutes les caractéristiques génétique… quelle a été sa vie…à quelle époque, etc…. En remontant plus loin, ils ont la possibilité de savoir qui étaient les parents, grands parents, aïeux, et ainsi de suite. C’est déjà pas mal.
La question de savoir si leur esprit a déjà vécu, et quel personnage ils auraient investi précédemment ne se pose pas, car la réincarnation n’est pas un sujet traité en 3012. Non qu’il soit tabou, ou même nié…. Le doute reste ouvert, de façon positive. Ne pouvant pas être étudiée de façon certaine, la proposition est simplement laissée de côté. Seuls les propos logiques façon Korzibski et La Palice, même s’ils sont irréalistes, sont appréciés.
Thomas sait qu’il est le clone d’un indien métissé de blanc. Il n’a pas, pour l’instant, cherché à en savoir davantage. Les bébés élevés en pouponnière jusqu’à l’âge de trois ans, n’ont pas de problème OEdipien, ou autres traumatismes dûs à des privations d’amour, ou à des affections débordantes d’exagération. Les personnes qui s’occupent d’eux les chouchoutent tous à
leur guise, mais toujours de façon calculée, souple, sans excès.
Ainsi de trois à dix ans, les enfants arrivent en colonies pour vivre en groupes. Ils sont dirigés par des adultes.
L’éducation scolaire, commencée par jeu dès la petite enfance, se poursuit de façon simple. Leur seule obligation est d’apprendre à lire, écrire, et pouvoir en arrivant en 6
ème, expliquer le Dictionnaire de Base composé de huit cents mots français, langue pratiquée en priorité. En effet, les fondements de l’éducation de la Cité ont été réalisés par des francophones.
Ce dico succinct est complété par deux compléments, un de grammaire et un de calcul.
Si un enfant désire approfondir un sujet quelconque, botanique, informatique ou autre, il peut obtenir le dictionnaire approprié. C’est ainsi que Léa s’est intéressée à l’Education et fait des stages en pouponnière.
La première règle est de n’attacher aucune importance aux différences. Que François soit noir, que Lister ait un problème d’audition contrecarré par un appareil informatique très performant ne pose pas de question. A la limite, on ne porte même pas attention aux spécificités : homme, femme, générations. Cela n’intéresse personne de savoir si un individu est parvenu au terme de sa croissance, ou non…
Seule la couleur des combinaisons montre que l’on est dans la classe des bébés, des enfants, des pré-ados, des ados ou des adultes qui eux-mêmes ne sont pas différenciés entre jeunes et vieux. A partir de dix huit ans l’âge n’existe plus
Tout se passe comme si les habitants de la Cité étaient considérés comme responsables « d’eux- mêmes » dès la naissance. L’entourage les aide à assumer leurs conditions, quelles qu’elles soient.
Ce sera, en priorité le Centre de rééquilibrage Psycho – Physio qui reçoit chacun, chaque matin, pour un contrôle de santé. Ce Centre est aidé par le suivi du bracelet informatique « XY », qui surveille, en permanence la température, le rythme cardiaque, la respiration, les échanges chimiques, etc.
Cette sorte de montre bracelet est la base de la vie civique. C’est grâce à elle que la gestion sociologique, pratique et concrète reste en équilibre stable. En effet, il suffit d’un seul appel diffusé dans l’ensemble de la Ville, pour que chacun, en en prenant conscience, puisse agir par sa seule réponse.
Lors d’évènements graves, la prise en charge des solutions, par l’ensemble des habitants, gère les situations mieux et plus vite qu’un gouvernement classique, qu’il soit monarchique, démocratique, pyramidal, ou même extrémiste.
Je considère que cette manière de vivre est extraordinaire. Voilà pourquoi lorsque je me « crée » cette vision du futur, (car je n’aime pas croire que je l’ai vécue vraiment), je me sens heureuse, comme si je me trouvais dans ce lieu précis, que je trouve magique.
La joie de vivre de l’enfance y est permanente. On pense d’abord à soi, mais pour soi-même, de façon à maîtriser les situations et les autres individus. Alors, on est souriant pour que les autres soient à l’aise.
Si mon voisin est désagréable, c’est bien de ma faute. Cela veut dire que je ne fais pas ce qu’il faut pour qu’il soit heureux. Mais si sa demande de bonheur se traduit par trop d’effort de ma part, alors j’abandonne. C’est un cas de légitime défense. Je ne vais pas me noyer pour sauver un bébé, si je ne sais pas nager.
Si tu es odieux avec moi, « qui que tu sois », je m’en vais vite. Je ne suis ni infirmière, ni psy. Par contre, je ne veux pas m’en faire pour « ça », puisque je n’y peux rien. Je reste de bonne humeur à tous prix. Il n’est pas question, « en plus » que je m’en rendre malade.
Frank va débarquer d’une minute à l’autre, pour dîner avec moi, comme presque tous les soirs. Il veut que nous parlions des Contes Méridionaux pour enfants que je suis en train de mettre en pages, sur sa demande.
Le groupe a commencé à prendre des notes pour ce bouquin basé sur mes souvenirs, intitulé : « L’enfant qui venait du Futur ». Je vais ressortir toutes ces belles histoires que ma grand-mère nous racontait lorsque nous étions en vacances dans notre vieille maison du Faron.
C’est facile. Je n’ai qu’à me souvenir de l’existence de la petite Bess et de tous ses malheureux anniversaires.
Depuis plus de trois ans, j’en parle avec Michel. Il adore les contes pour enfant. C’est avec lui que nous avons créé, tous les quatre, l’Association « Imaginaire Planétaire »>. Son but est de promouvoir toute action positive, en faveur de l’individu et de son environnement.
Patronnée, à sa création par le Ministère de la Culture, pour la qualité de ses activités, elle s’occupe de toutes ces choses qui m’intéresse tant : « Centre des Différences », Improvisation Théâtrale, Spectacles de Slam ou de Contes.
Nous allons parler de tout cela, ce soir. Mais je sais surtout, que nous allons tous, avoir droit à un speech de Frank, sur les problèmes économiques du moment.
Je n’oublie pas que c’est avec lui que nous avons poussé Michel, lors de ses conférences Rue de l’Abbé Grégoire, à créer ces fameux Nads, billets basés sur la monnaie parallèle de Silvio Gesell.
En ce moment, les mouvements de l’Europe contre la France traitée de conservatrice parce qu’elle veut soutenir ses usines automobiles pour les empêcher de délocaliser l’énervent beaucoup.
Quand aux millions de dollars qu’Obama sort actuellement de sa planche à billets, ne ressemblent-ils pas à de la monnaie franche ? Pourquoi n’en ferions-nous pas autant ? A moins que notre Président, aidé en cachette par la Banque de France, n’ai pas déjà commencé la farce.
J’ai bien retenu les propos tenus dans la revue bancaire de l’époque de 1960, par le Directeur de la Banque de France. Celui-ci, y reconnaissait que, « puisque personne » ne peut mettre le nez dans leurs affaires, il leur est possible de faire n’importe quoi, sans que « quiconque » le sache.
La discussion va être houleuse. Frank va mettre la télé en route, ce que j’évite de faire au moment du repas. Les infos vont l’énerver au plus haut point… et à moins qu’il ne vienne accompagné de Mathieu, Michel ou Gabriel, c’est moi qui vais tout prendre.
J’espère pourtant qu’il aura pitié de moi ? C’est peut
-être possible, car hier, à une réunion traitant des ateliers que nous avons en préparation, un de nos amis, Mikaël, a abordé les problèmes qui nous attendent dans le futur et Frank, par je ne sais quelle folie aberrante, s’est mis à parler de ma propre vision axée sur une vie citadine, coupée du reste de la nature. Il était intarissable ! Il a eu beaucoup de succès.
Mais moi, j’ai naturellement fait figure de folle. L’ensemble de l’assistance, a demandé quelle drogue je prenais en soulignant qu’ils en voulaient, car c’était de la bonne. Comme tout le monde était d’excellente humeur, personne n’a parlé de me brûler comme sorcière.
Ils m’ont soutenu qu’un avenir avec des clones, serait « l’horreur ». Ils ont même souligné que cela ressemblait fort à de l’eugénisme, le développement de la race pure, Hitler quoi. J’ai eu eau leur expliquer que le fascisme cherchant à créer des surhommes, blancs naturellement et supérieurs en intelligence n’avait rien à voir à cet avenir qui décide de cloner toutes sortes d’individus divers.
Si en mille ans, on fabrique cinquante clones de Zidane… avec en plus vingt clones de l’Abbé Pierre… quatre clones d’Obhama… douze de Simone Weil… etc… qui vivent chacun, en moyenne plus de cent cinquante ans… qui peut logiquement, parler de race « pure » !
Mais ils n’écoutaient pas. Finalement j’ai évoqué la révolte des « descendants d’esclaves noirs » de la Guadeloupe, exploités par les descendants de négriers, les « becquets » actuels. Je leur ai demandé s’ils trouvaient normal que ces pauvres gens devenant de plus en plus pauvres vue la conjoncture actuelle, se privent de tout… pendant que les autres ne se privaient de rien.
Frank est venu à mon secours en précisant que le fait de leur redonner du pouvoir d’achat, afin qu’ils puissent se payer un billet d’avion pour venir voir leur famille résidant en France, allait relancer l’économie, l’industrie et la destruction de la planète par dessus le marché. Il ne loupe pas une occasion de stigmatiser les fabrications d’objet inutiles..
Mais il ne voyait pas non plus pourquoi, seuls ceux qui peuvent s’offrir une piscine, deux ou trois « quatre/quatre », un jet privé, et la suite, auraient le droit de polluer la terre.
Son intervention a détourné l’attention de mes propositions futuristes, pour la porter sur le déséquilibre mondial, écologique, économique et monétaire. Je me suis bien gardée de parler de nos recherches, interviews, rapports, et expériences sur la monnaie franche. Je ne maîtrise pas assez bien le sujet.
Dix neuf heures... Frank n’est toujours pas là. Je vais en profiter pour attaquer un chapitre sur Bess, mon enfance à moi. Le sujet m’est pénible. Je n’aime pas du tout évoquer ces instants du passé. Le désarroi de cette petite inadaptée me fait mal, même et surtout encore maintenant.
C’est bizarrement, au moment de la célébration de ses anniversaires, que des faits insupportables se déclenchaient. Chaque fois que la famille voulait me faire plaisir, ses cadeaux bienveillants pourtant, se manifestaient à contre-courant.
Les difficultés arrivaient surtout dès qu’il s’agissait de morale. Je ne supportais pas l’idée d’être OBLIGEE d’obéir à des règles qui cherchaient à embrigader la totalité des êtres humains. Hélas, il n’était pas question pour moi, de vouloir avancer l’idée que je n’étais pas un mouton du groupe, mais une entité à part entière.
Je ne voulais pas être considérée comme quantité négligeable, encore moins être traitée comme un objet. L’exemple de l’exhibition de ma « beauté » enfantine, me poursuit encore.
Un psychanalyste freudien ou même lacanien, se régalerait à l’idée de me faire régresser à cette époque pour me faire effacer ce traumatisme. Pourtant, c’est tout ce que je récuse. Car je « SAIS » bien, que cette perturbation ne pourra jamais se transformer en un épanouissement de « femme normale, mariée ou assimilée, heureuse d’être considérée comme bien intégrée dans la société »….
Parce que je ne suis PAS normale… puisque je ne suis « RIEN ».
Il y a pire pourtant…
La plus terrible des choses, serait de se reconnaître « objet » et se violer soi même par l’acceptation de cette reconnaissance. Celui qui accepte cette vision, s’adonne alors au masochisme, et s’il cherche à se servir de l’autre en l’asservissant comme un objet asservi, il devient sadique.
Aller de l’un à l’autre peut transformer l’individu en un détraquée du sexe le privant de la liberté d’être heureux comme l’enfant ignorant ces contraintes.
Malheureusement, on cherche toujours à se mouler dans le modèle proposé par la société. Toutes les catastrophes démarrent de là.
Je me souviens, comme si c’était hier, du jour de mes sept ans….
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 4 autres membres